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Disiz nous plonge dans son « Pacifique » pop, envoûtant et profond

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Pacifique Disiz Review

Pour son onzième opus, Disiz La Peste a exploité un nouvel horizon, orné de pop et d’émotions esthétiques. Le pari est délicieusement réussi tant Pacifique semble son projet le plus complet.

Le ciel est bleu, l’eau turquoise et une douce musique électronique rythme cet instant de contemplation si singulier. Seul face à un Pacifique si grand, si captivant, Disiz s’est jeté tête la première dans un océan d’électro parsemé de rap et de lyrics puissantes. La tête surchargée de deux longues années intenses, il en avait des choses à dire et l’artiste s’est émancipé d’un milieu tristement oppressant pour délivrer un voyage de 20 morceaux d’une esthétique fascinante. Pacifique, onzième album d’un artiste particulier, versatile, mais ô combien entier, s’impose comme le plus complet et abouti de sa carrière. Un ovni atterri au bon milieu du fade paysage français. Un récit débordant de larmes, de sourires, d’inquiétudes, de sursauts. Bref, une véritable claque.

Le grand saut

Plus qu’aucun autre style, le rap se fond dans des codes, des exigences, des tendances. Ces dernières rythment l’actualité et impulsent aux artistes une marche à suivre. Néanmoins, la véritable force, c’est d’aller à contresens, insuffler sa propre ambiance en s’opposant aux tendances. C’est ce que l’on appelle, la devance. Pacifique, plus que jamais, en est la définition brute. « Dans mon approche, je voulais illustrer des émotions, de la manière la plus pure et la plus transparente possible, explique Disiz autour d’une table ronde où Hip-Hop Infos France était convié.  Et si c’est une pulse électro qui m’inspire, alors pourquoi, si je suis un rappeur, je dois m’imposer des barrières. » 

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Au bon milieu d’une guerre civile impliquant le « vrai rap » et le « rap commercial », Disiz a osé. « Dans mes autres albums, j’allais pas au bout, et là, avec l’âge et la maturité, j’ai réussi ». Dans sa conception artistique, Pacifique est un bijou. D’instrumentales envoûtantes à un travail sur le mixage exceptionnel, tout est parfait. Même si l’opus caresse plusieurs états d’esprit, allant de la nostalgie de « Qu’ils ont de la chance » au très cru « L.U.T.T.E. », la même ligne directrice guide le rappeur jusqu’au bout. Ancré dans un univers définitivement pop, Disiz n’utilise, ironiquement, jamais d’autotune, se contentant de sa voix brute et d’un travail électronique prodigieux.

« Le risque était là, nuance néanmoins l’artiste, c’était une personne en fait, c’était mon pote, le risque était là tout le temps ». Pop et rap, la finalité est souvent nuancée. Ici, il faut appréhender, prendre conscience que le boom-bap n’a pas sa place, ni les basses d’un bon vieux morceau trap. La comparaison avec Kid Cudi semble tout à fait légitime : un fond d’électro avec un cœur hip-hop. Même jusqu’à l’esthétique de la cover ou les somptueux visuels diffusés, Pacifique aspire à un univers propre et singulier.

 

La double lecture du Pacifique 

Tout l’environnement qui entoure l’opus se construit autour de l’océan, ses vagues et sa tranquillité. Mais comme un message subliminal divinement construit, une autre définition peut découler de ce Pacifique. Celle qui s’assimile à la paix, à la tranquillité. Être pacifique. Excepté quelques fulgurances dont il a le secret, Disiz respire la maturité, la tranquillité et surtout le besoin d’évacuer ses émotions à travers une profondeur inouïe. Plus loin dans la métaphore, les vagues semblent dessiner ces émotions : elles partent, puis reviennent. Ce Pacifique, ne serait-ce pas Disiz lui-même ?


Le travail des émotions est, par ailleurs, au cœur de l’album. Même la tracklist aspire à dessiner successivement plusieurs paysages. On passe de la haine de « L.U.T.T.E. », ironiquement, à « Quand je serai chaos ». Dès l’ouverture de l’opus et son troisième morceau « Splash », l’artiste s’exclame « Je plonge », une phrase à plusieurs sens qui semble illustrer une tentative de suicide comme en témoigne le clip. Néanmoins, l’album se termine sur deux notes de couleurs fraîches, le génial « Ca va aller » où dans le clip, faisant suite à « Splash », Disiz semble rassurer l’enfant aux tendances suicidaires. Puis, l’exceptionnel « Auto-Dance » où le rappeur trouve la résolution à tous les problèmes évoqués dans Pacifique. Il expliquait d’ailleurs, que « si les fans ne devaient retenir qu’un seul de mes sons, ce serait « Auto-Dance ».

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L’album de 2017 ?

Irrévocablement, Disiz a réussi son pari. Éblouissant et constant dans sa volonté d’exprimer des émotions avec un visage pop, Pacifique est une oeuvre colossale dans sa réalisation et son écriture. Plus que jamais, le rappeur a maîtrisé l’alliage du fond et de la forme. A vouloir pousser son idée jusqu’au bout, Disiz a franchi une barrière que personne n’avait jamais osé bousculer jusque-là. Plus haut, on évoquait une devance, une marche à suivre. Une fois n’est pas coutume, la philosophie de Pacifique est à suivre, sans modération.

Le mot de la fin sera pour lui et le génial « Autre Espèce », Pacifique « ne vient ni du futur, ni du passé, mais tout simplement d’ailleurs ». Tout simplement comme lui, un artiste quasi autarcique à la sphère rap, qui lui est presque hostile, mais qui l’a déjà vu récidiver ses pulsions frénétiques à onze reprises. Et cette onzième semble inlassablement être la meilleure.

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