Musique
Doit-on réellement se justifier de décaler son album pour éviter PNL ?
Repoussant son album de deux semaines, Columbine a, hier, donné comme seul justificatif de vouloir écouter tranquillement l’album de PNL. Déçus, certains fans ne semblent pas avoir compris les enjeux.
Columbine a décidé de décaler la réédition de son album, prévu le 5 avril prochain, au 19 avril. Une réflexion lucide, après l’annonce tonitruante de la sortie de Deux frères, le quatrième album de PNL, le même jour. Dans les commentaires et dans certaines réactions aperçues sur les réseaux sociaux, certains s’étonnent que la sortie d’un album en repousse un autre. Pourtant, c’est plutôt cohérent. Le vendredi 5 avril s’annonçait déjà comme un gros rendez-vous avant même que PNL n’annonce la sortie de son opus. RK, Columbine et Zola, tous les trois attendus dans des styles différents, avaient coché la date sur leurs agendas. Une concurrence saine, après tout compréhensible, tant l’offre rap s’accroît semaine après semaine.
Mais PNL en a décidé autrement. En choisissant, à son tour, la même date, le groupe parisien a décidé de concentrer à lui seul l’attention. En fait, PNL a sûrement établi sa stratégie promotionnelle depuis de longs mois, épargnée de la pseudo concurrence que pourrait lui accrocher le rap. Seule une immense pointure aurait eu le luxe de faire revoir la sortie de Deux frères, à l’image d’un Nekfeu ou Booba (et encore…), le reste malheureusement, ne représente pas réellement de risque commercial pour eux. Force est de constater également que le groupe a mis en place une phase de communication phénoménale, appuyée par des clips au sommet de la Tour Eiffel ou des bus frappés de la cover de l’album. Ainsi, comment faire le poids ?
Garder la même date, mais à quel prix ?
Il faut savoir que le rap n’est pas qu’un exercice de concurrence, une sorte de compétition chiffrée où les ventes réguleraient un classement du game. Avant d’être meilleurs que les autres, les artistes ont avant tout besoin d’être bons eux-mêmes, en ayant des retours commerciaux à la hauteur de leurs attentes. Car les projets demandent un certain investissement, qu’il soit financier ou évidemment, artistique. Pourquoi prendre le risque de sortir un projet le jour où le groupe de rap le plus attendu de France va sortir le sien, après trois ans d’attente ? Et ce, alors que je pourrais sceller un autre vendredi, deux semaines plus loin, épargné de cette concurrence disproportionnée.
En ce qui concerne les fans de Columbine, ils sont déçus du décalage. Mais en réalité, les personnes visées par celui-ci sont légèrement extérieures à la fanbase du duo. Le jour de la sortie, et ce malgré l’ampleur de PNL, les fans du groupe rennais auront parfaitement intégré la sortie de la réédition. Maintenant, iront-ils d’abord écouter Columbine avant PNL ? Puis les autres, possiblement intéressés et interpellés par le projet, n’auront même plus la moindre curiosité.
Décaler la sortie et ravaler sa fierté
La promotion est alors faussée, même en terme de portée médiatique. Sur Interlude, par exemple les news autour de Columbine et PNL vont forcément se chevaucher, et se supplanter. Puis, les autres médias généralistes qui auraient pu s’intéresser aux Rennais vont également privilégier PNL et donc limiter l’exposition de ce nouveau projet. Il ne s’agit donc pas d’un simple recul « fragile » (ce sont les mots de certaines réactions), mais plutôt d’une décision intelligente qui découle d’une équation commerciale finalement réalisée rapidement.
Au contraire, le décalage de Columbine est plutôt courageux, là où d’autres artistes, par le passé, ont déjà subi ce genre de concurrence déséquilibrée, comme une sorte de fatalité irrémédiable. La preuve que non, et désormais, seul l’imaginaire pourra assurer quelle était la bonne décision, faute de preuves chiffrées.
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