Musique
Eminem : cinq choses à retenir de « Music to be murdered by »
Un an et demi après Kamikaze, Eminem a signé un retour en fanfare avec Music to be murdered by, un onzième album surprise et déjà emprunt à des réactions contradictoires.
C’est lorsqu’on l’attend le moins qu’Eminem frappe. Un an et demi plus tard, Slim Shady a récidivé, ajoutant à la dernière minute sur les plateformes streaming un opus surprise, imprévu et lourd de sens : Music to be murdered by. Tellement imprévu, qu’il en a même surpris notre plateforme française, Deezer, pris de court et n’upluoadant l’opus qu’en fin de matinée.
Si ce nouvel opus retentissant a déjà violemment secoué le paysage hip-hop, il conserve, encore et toujours, la verve flamboyante d’Eminem, couplée à des punchlines chargées de polémiques et un engagement assumé envers des États-Unis toujours plus au coeur des propos du rappeur. On fait le point ?
7 productions de Dr. Dre
Les images publiées sur les réseaux sociaux n’auront cette fois trompé personne : oui, Dr. Dre est bien présent sur Music to be murdered by. À sept reprises. Le serial-producteur américain ne s’était pas glissé dans les crédits d’un album d’Eminem depuis « So bad », sur Recovery. Dre a fait une apparition anecdotique sur Revival à travers l’introduction du morceau « Remind me ». Mais sinon : rien. Rien du tout. Il était même complètement éclipsé de Kamikaze, en 2018.
Ces sept productions sur Music to be murdered by marquent la volonté de renouer avec une esthétique d’antan. Eminem se re-dote d’une ambiance sombre, semblable (toute proportions gardées) à The Eminem Show. L’analogie se traduit jusqu’aux artworks des deux opus : on y retrouve cette même couleur rouge flambante et un Eminem en costume. Cette fois, accompagné d’une pelle et d’un trilby. Sympa.
Un combat contre les armes à feu…
417, c’est le nombre de fusillades survenues aux États-Unis en 2019 selon Gun Violence Archive. Suffisamment pour inspirer Eminem pour son clip « Darkness », véhément dressé contre la politique des armes à feu aux USA. Le morceau retrace la tragédie de Las Vegas, en octobre 2017, où un tireur a tué 58 personnes dans un festival de musique. De manière habile, Eminem s’empare du costume de Stephen Paddock, l’auteur de la tuerie, dans la chambre d’hôtel où il a planifié la fusillade. On y retrouve toute l’ambiance dépressive, sombre et pesante du tireur, sublimée par le recul froid d’Eminem.
Médias et politiques : Eminem renvoie des images d’archives effarantes des tueries commises outre-Atlantique. On y retrouve également celle de Columbine, dans un lycée. L’objectif est assumé, comme dans certains morceaux présents (« Greatest », en 2018) : tancer la position américaine sur les armes à feu.
… et un engagement «blessant»
Comme pour, une nouvelle fois, illustrer la schizophrénie cinglante qui définit son personnage depuis le début de sa carrière, Eminem s’est montré beaucoup plus maladroit dans le titre « Unaccomodating » avec Young M.A.. Dans ce morceau, l’artiste fait une allusion à l’attentat à l’encontre d’un concert d’Ariana Grande, à Manchester, en 2017 : « I’m contemplating yelling ‘Bombs away’ on the game/Like I’m outside of an Ariana Grande concert waiting« . Ce jour-là, 22 personnes sont décédées.
Cette punchline beaucoup plus teintée d’humour noir a fait violemment réagir les fans de la chanteuse, évidemment. Elle est également remontée jusqu’au maire de Manchester, Andy Burnham, comme le relaye FranceInfo. «C’est inutilement blessant et profondément irrespectueux pour les familles et ceux qui ont été affectés». Et aux fans du rappeur de rétorquer qu’il a récolté près de 2,5 millions d’euros pour les victimes de l’attentat.
Un album de Jeff Alexander en 1958
Ce nouvel opus d’Eminem s’inspire d’un album de Jeff Alexander, publié en 1958 : Music to be murdered by. Le musicien a mis en musique l’oeuvre d’Alfred Hitchcock. L’âme de l’iconique réalisateur américain surplombe l’album du début à la fin. Sa présence est même relevée à deux reprises dans la tracklist : lors d’un interlude précédent le titre « Those Kinda Nights » avec Ed Sheeran et pour l’outro de l’opus.
Même constat pour les artworks, généreusement inspirés de l’originel. On y retrouve Alfred Hitchcock, pistolet sur la tempe et hache dans l’autre main. Eminem reprend cette exacte mise en scène pour l’une des covers alternatives. Sur la principale, le trilby porté par l’artiste est tiré d’un roman de George du Maurier, père de Daphné du Maurier, dont les romans ont inspiré le réalisateur.
L’album d’Eminem avec le plus de collaborations
Parlons, finalement, des collaborations. Music to be murdered by compte près de 14 collaborations. Un record, pour un album d’Eminem. Certains artistes sont présents à plusieurs reprises (Royce da 5’9″ est présent sur trois morceaux), mais Eminem a également pu compter sur plusieurs featurings inattendus, à l’image de Young M.A. ou encore le défunt Juice WRLD.
Anecdote sympathique également : aucun de ces artistes n’étaient au courant que leur couplet pour Eminem allait nourrir un prochain album surprise. Pour conserver le secret autour de son opus, l’hôte se refuse de prévenir ses invités, coûte que coûte. On imagine tout de même que ses plus proches collaborateurs, et notamment Royce da 5’9″ étaient prévenus. Pour Young M.A., en revanche, elle a découvert le morceau en même temps que les fans, se targuant d’une réaction légendaire sur Instagram : «Je suis sur l’album d’Eminem». Du Marshall Mathers tout craché.