Musique
Et si on écoutait les albums sans connaître la tracklist ?
Écouter un album sans en connaître la tracklist, et pourquoi pas ? Pour ou contre : on en débat.
«Ce monde est cruel donc j’m’attends au pire». Combien sommes-nous à avoir souri, surpris, lorsque SCH a rebondi sur le refrain de Vald dans son titre « Halloween » ? Non dévoilée dans la tracklist, la collaboration a été masquée, bien qu’elle existe réellement un track plus tard, avec « Dernier retrait ». Cet exemple fait partie d’une infime poignée de collaborations maintenues secrètes jusqu’à la sortie de l’opus. Une rubrique dans laquelle l’apparition de Niska sur Les étoiles vagabondes se glisse discrètement.
Mais sinon, les invités font désormais partie intégrante de la stratégie commerciale d’un opus. Et au-delà des featurings, c’est toute la colonne vertébrale d’un projet qui se dévoile à l’annonce des morceaux. Avec les réseaux sociaux et la vitesse de l’information, difficile d’ignorer tous ces éléments avant une première écoute. Mais l’expérience serait-elle intéressante ? L’avis est partagé : zoom.
Les arguments positifs
La découverte artistique. Écouter un album sans en connaître la tracklist sous-entend de le découvrir qu’à travers sa pochette. Pas de single, pas de collaboration, ni même le nom des pistes. L’expérience doit être fascinante. Au fil des morceaux, on est emporté dans le monde de l’artiste, confronté à son processus créatif au plus près. Ici, on essaye ni de quantifier la performance, ni d’évaluer la qualité : on écoute et on prend le temps d’apprécier l’expression réelle d’un album.
La surprise des collaborations. À l’écoute d’un éventuel featuring, la sensation se veut beaucoup plus forte émotionnellement, plus marquante pour l’auditeur. Regardez simplement la réaction d’Amin et Hugo lorsqu’ils entendent la voix de SCH sur « Halloween » ! Les featurings réserveraient cette surprise là, ce côté épic et mystérieux. La tracklist se révèle au fur et à mesure de l’écoute, et non en amont, de quoi jauger la pertinence des invités à cette place précise de l’opus.
Dénué de stratégie commerciale. À l’heure de l’omniprésence des réseaux sociaux et des conspirations branlantes, l’absence de tracklist jusqu’à la première écoute permettrait de supplanter la stratégie commerciale par la démarche artistique. Aucun intérêt d’avoir des noms ronflants ou des invités impertinents pour l’artiste. Tandis que l’auditeur a tout le luxe de spéculer seul dans son cerveau à l’écoute de chaque morceau.
Les arguments négatifs
Difficile de capter l’univers de l’artiste. Aujourd’hui, la cover, la tracklist et surtout les premiers singles permettent de jauger la direction d’un artiste avant son opus. Exclure ces deux derniers éléments contraint à écouter l’album comme une feuille blanche. D’un côté, l’aspect est positif, pour une lecture brute dès la première écoute. En revanche, difficile pour l’artiste de guider l’auditeur vers son univers, ou de lui exposer le contenu qu’il tente de lui réserver. Le contraste entre les attentes de l’auditeur et l’ambiance proposé par le rappeur peut s’avérer dangereux.
De trop grosses attentes ? Et si, finalement, on attendait des collaborations qui ne viendront jamais. Masquer la tracklist, c’est aussi risquer de gonfler l’impatience d’un auditeur, sans parvenir à la combler. Si la liste des invités s’annonce plus sobre, l’auditeur va dérouler l’album dans l’attente d’une voix familière à chaque début de couplet. Et même en cas d’une tracklist dense, chaque morceau sera un nouveau voyage où la curiosité malsaine des collaborations actuelles pourrait prendre le pas.
Aucune stratégie commerciale, justement. Prenons l’analyse de l’autre côté du miroir : si écouter un album sans tracklist permet d’éviter à la stratégie commerciale d’écarter l’aspect artistique, cela soulève toutefois de sacrés défis financiers. Un album est avant tout créé pour être écouté et donc vendu, et la tracklist est dévoilée pour promouvoir cette vente. La retirer reviendrait, pour l’artiste, à sacrifier une grosse partie de sa promotion. Ainsi, l’expérience artistique en vaut-elle la peine ? On vous laisse faire l’expérience.
[irp posts= »64344″ name= »13 Block : le ministère de l’Intérieur et la police nationale condamnent Fuck le 17″ »]