Musique
L’unique exemplaire de l’album secret du Wu Tang Clan vendu aux enchères
Le mystérieux album du Wu Tang Clan, Once Upon a time in Shaolin, vient d’être vendu aux enchères. Les bénéfices vont permettre de solder la condamnation de Martin Shkreli, alias « l’homme le plus détesté d’Amérique », qui l’avait acheté en 2016.
Cet opus secret, enregistré entre 2008-2013, est un double album du Wu Tang Clan. Très peu de personnes auraient entendu les tracks. Tout ce que l’on sait: il n’existe qu’en un seul exemplaire et renferme 31 titres répartis en deux “écoles” : la Shaolin School et l’Allah School.
Une première référence au kung-fu Shaolin né dans le monastère éponyme. La seconde, à la Five-Percent Nation, une organisation qui milite pour les droits des Afro-Américains. RZA, l’un des membres du groupe, qualifiait cet album « d’important pour l’héritage du Hip-Hop ». Once Upon a time in Shaolin fut enfermé à sa création dans une boite somptueuse, incrustée de bijoux en argent frappée d’un sceau en cire marquée par le célèbre W.
Lors de l’annonce du projet en 2015, 150 personnes parmi des journalistes et spécialistes, sont triées sur le volet pour écouter seulement 13 minutes de l’album. Quelques semaines plus tard, il est vendu aux enchères pour 2 millions de dollars. L’identité de l’acquéreur fait alors scandale.
L’homme le plus détesté d’Amérique.
Les fans sont dépités. L’acquéreur de l’objet si convoité n’est autre que Martin Shkreli, un investisseur gestionnaire d’une société pharmaceutique, qui a récemment dégouté le pays. Quelques temps auparavant, le magnat financier a en effet fait augmenter de 5 400% le prix du Dataprim, traitement unique contre le VIH. Shkreli se défendait: « Nous vivons dans une société capitaliste soumise à un système capitaliste et à des règles capitalistes. Mes investisseurs attendent donc de moi que je génère le maximum de profit. »
Mais le problème pour l’homme d’affaires est qu’il ne peut pas générer de bénéfices avec l’album. Du moins pas avant 2103, soit 88 ans après la sortie. (ndlr: les 8 membres du groupe de rap) En revanche, il peut rendre le projet disponible gratuitement. Provocateur, l’homme d’affaires va alors jouer avec les nerfs des fans: il ne rendra l’album disponible que si Donald Trump remporte les élections en 2016. Lors de la victoire du milliardaire, il ne diffuse que quelques minutes du projet. Pire, il annonce même vouloir détruire l’album, ou de l’envoyer dans un lieu reculé pour obliger les fans à un voyage « spirituel ». Un vrai troll d’Internet, que le Wu Tang Clan n’hésitera pas à clasher dans un de leurs morceaux. L’album lui, est toujours introuvable, au grand dam des fans. Récemment, une nouvelle péripétie va relancer l’affaire…
Un changement de propriétaire
Condamné pour fraudes fiscales en 2017, Martin Shrekli doit rembourser 7,3 M de dollars au fisc. Le magnat ne se prie pas pour mettre l’album aux enchères sur Ebay à 1M de dollars mais la justice s’empare de ses bien. Dont le fameux sésame. Dans les mains de la justice depuis 4 ans, on apprend aujourd’hui que l’album vient d’être vendu aux enchères. On ne connait ni le prix, ni l’identité de l’acheteur. On sait simplement que cette vente permet maintenant d’acter le règlement des « saisies relatives à la condamnation de Shrekli« . Une page qui se tourne et qui ouvre la voie à l’espoir d’entendre un jour ce projet si secret.
« Earlier today, the United States sold the sole copy of the Wu-Tang Clan album ‘Once Upon a Time in Shaolin' » … forfeited by Martin Shkreli.
Photo of the album here. pic.twitter.com/fHcCjNuq88
— Adam Klasfeld (@KlasfeldReports) July 27, 2021
Cette histoire rocambolesque, jamais les membres du Wu Tang Clan ne l’auraient imaginé. RZA disait lors de la présentation de l’album au MoMa PS1: Un enregistrement de musique doit être considéré comme une œuvre d’art. La musique a perdu sa valeur, elle n’est qu’une donnée parmi d’autres. On a dématérialisé notre travail, notre art n’a plus aucun cadre. Alors souvenez-vous de cela : les choses n’ont de valeur que lorsqu’elles sont rares. »
En attendant d’écouter les 31 titres de l’album, on se contente de cet extrait disponible sur Youtube, diffusé par Martin Shrekli dans un live.