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Avec « Deo Favente », la grâce de Dieu se heurte aux pêchés capitaux

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L'artiste marseillais est de retour avec son deuxième album Deo Favente, teinté ironiquement des sept pêchés capitaux.

L’artiste marseillais est de retour avec son deuxième album Deo Favente, teinté ironiquement des sept pêchés capitaux.

Par la grâce de Dieu. SCH s’est donc inspiré librement de la religion pour son second opus. Un comble presque, pour celui qui posait majeur en l’air façon Blow sur un A7 glacial, aux fulgurances parfois presque sataniques. Un premier projet complet, mêlant inspiration mafieuse et street, un OVNI au milieu de trap, afrotrap ou morceaux trop vaguement conscients. Par la grâce de Dieu. Un comble quand même, pour celui qui a déclenché dans la foulée son Anarchie. Un ton moins bien, ce premier album essuyait des tentatives fiévreuses, des styles branlants, à milles lieux de l’univers qu’il s’était dessiné. Un projet qui reste malgré tout respectable, avec un charisme, une allure et une puissante prestance artistique. Mais soit alors, SCH s’est inspiré de la « grâce de dieu » pour son second opus. Il s’agit donc de voir ce qu’il vaut, une fois confronté aux sept pêchés capitaux.

L’Orgueil

L’Orgueil est le fait de s’attribuer des qualités que l’on n’a pas, de tout rapporter à soi. L’orgueilleux se croit supérieur et plus méritant que les autres individus qu’il méprise.

L’orgueil est le plus grand des pêchés, mais aussi et surtout la plus grande qualité d’un rappeur. Laissé exploser son égo pour façonner ses textes, se montrer supérieur à son adversaire : telle est la loi de la jungle qui oeuvre dans un milieu froid à souhait. Et parmi eux, SCH semble en être l’un des plus dignes représentants, par sa qualité d’écriture indéniable, ses punchlines glaciales et ses manières extraverties. Il s’était notamment découvert ce talent dans l’excellentissime A7. Une facette bien moins représentée dans Deo Favente où seuls « Nino Brown », « Poupée Russe », « 6.45i » ou « Comme Si » viennent relever un opus étonnamment sage.

L’Avarice

L’avarice est une tendance à s’attacher de façon compulsive aux richesses matérielles, jusqu’à les idolâtrer.

Pour celui qui fredonnait : « Féfé sur les Champs, j’ai pas loué », difficile de faire plus « avare » dans sa définition la plus brute. Evidemment, et comme dans tous les textes de rap, l’argent prend une valeur toute particulière chez SCH. Symbole de la réussite, il est même fièrement exposé dans ses clips. Mais si l’on considère désormais l’« avare » en termes de générosité, il n’en est rien. Deo Favente est un opus complet qui balaye une flopée d’univers divers, avec plus ou moins de réussite. On retrouve, cependant, une petite pointe d’avarice dans le manque de featuring, où seul un Lacrim en demi-teinte a donné de sa voix sur le morceau « Ça va ». Une nouvelles fois, le rap français semble s’habituer à ce manque cruel de collaboration qui enraye la profondeur artistique d’un opus. Peut-être que quelques soutiens auraient « excuser » des prises de risque parfois mal choisies.

 La Colère

La Colère est un mouvement désordonné de l’esprit vers la violence, qui se manifeste par l’éclat de voix (hurlements), des gestes vifs, voire des paroles offensantes et la vengeance.

Moins présente dans cet opus, la colère est pourtant le fruit du succès de SCH. Cette obscurité, cette noirceur presque lugubre. Le titre « Comme si » représente cet esprit-là, et les excellentes « Années de plomb » aussi dans l’idéal. Néanmoins, ce pêché omniprésent dans A7 semble s’être atténué en dépit d’autres vertus, comme l’Amour ou des thèmes plus légers (sans tomber dans la bouillie mielleuse commerciale).

La Luxure

À l’origine, la Luxure désigne l’expression d’un désir désordonné, d’une jouissance déréglée. Il s’agit de la recherche sans retenue des plaisirs de l’amour physique, des plaisirs sensuels. Une sorte de débauche.

Comme quoi, voilà un énième pêché appuyé par le rap. Les clips de SCH, à commencer par « 6.45i », témoignent aussi de cette forme de luxure matérialiste. Puis, évidemment, pas besoin de faire un dessin pour comprendre les références de SCH au sexe.

La Paresse

La Paresse est un amour du repos, qui nous pousse à omettre ou à négliger nos devoirs, plutôt que de nous faire violence pour les remplir.

Voilà enfin un pêché particulièrement intéressant. Outre les nombreuses prises de risque déjà évoquées, à l’instar de « Day Date » ou « Ma kush », SCH a plus ou moins fait dans « l’acquis » pour certaines musiques. On retrouve du « Je la connais » dans « J’attends »,  du « Fusil » dans « La Nuit »,  du « Liquide » dans « 6.45i ». Plus que ça, l’exceptionnel clip de « Comme Si » respire des couleurs très « gomorresques », mélangeant les ingrédients secrets du « S » : un couplet unique, surpuissant et sombre. Evidemment, le raccourci vers la « paresse » reste approximatif, mais cet argument contraste avec quelques tentatives parfois « gourmandes ».

La Gourmandise

La gourmandise est l’envie désordonnée de manger ou boire quelque chose que l’on aime sans en avoir le besoin, c’est à dire en l’absence de faim ou de soif.

L’interprétation de la gourmandise doit, pour Deo Favente, se comprendre sous sa forme d’en « vouloir un peu trop ». C’est ce que l’on peut reprocher à SCH dans ses quelques tentatives fumeuses. Mais force est de constater que les morceaux diffusés ont masqué la face cachée de l’iceberg. Les très « sales » « 6.45i », « Comme Si » ou « Poupée Russe » ont maquillé un opus bien plus soft. On enchaîne les morceaux sans trop savoir à quelle sauce être manger, quelle porte ouvrir et quel univers découvrir derrière. On reste la bouche entrouverte sur « Les années de plomb » avant de se surprendre à bouger la tête bêtement, et sans trop savoir pourquoi, sur « Temps mort ». Si le tout reste est globalement cohérent, SCH renvoie l’impression d’en vouloir beaucoup trop sans réussir à plaire sur tous les morceaux.

L’Envie

Par définition, l’Envie est le sentiment que l’on ressent lorsque l’on convoite le bien d’autrui.

Une nouvelle fois, il est nécessaire d’interpréter l’envie sous sa forme artistique : en l’occurrence, l’envie de bien faire. Et pour le coup, Deo Favente est très intéressant dans sa composition. En particulier quand on le compare à un autre gros projet récent en la personne d’Ipséité de Damso. Les reproches qui découlent de ce dernier sont le manque de prise de risque, cette idée qu’il se cloisonne à un univers sans trop étirer son potentiel. À l’inverse, pour un Deo Favente, il s’agirait presque de l’inverse : une recherche perpétuelle de renouvellements. On a parfois même une perte de la matière originale, celle qui a fait la force et la beauté d’A7, et on se surprend à se dire « Ah, là c’est du vrai SCH » sur quelques titres. Deo Favente est un projet complet, équilibré, à mi-chemin entre une Anarchie éparpillée et un A7 trop froid.

Vous pouvez écouter Deo Favente sur toutes les plateformes de streaming.

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