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C'est donc acté : Booba et Kaaris se fouteront sur la gueule en juin, en cage et en Tunisie. Mais franchement, même avec le papier signé dans lds mains, on a du mal à croire que tout ceci n'est pas (encore) une vaste blague. C'est donc acté : Booba et Kaaris se fouteront sur la gueule en juin, en cage et en Tunisie. Mais franchement, même avec le papier signé dans lds mains, on a du mal à croire que tout ceci n'est pas (encore) une vaste blague.

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« On veut la bagarre ! »

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Dans l’ombre d’une organisation improbable et gargantuesque, une hype sans précédent semble atteindre deux artistes qui cherchent à régler leurs comptes dans un octogone. Aussi ironique et fantasmatique que soit le combat, on se plaît à suivre, comme une série redondante, les aventures d’Armand et Élie. 

Les sitcoms américaines n’ont qu’à bien se tenir, la comédie française a de beaux jours devant elle. Ici, pas de rires absurdes à la fin de chaque vanne balancée à l’écran, mais des millions de commentaires accumulés sur des dizaines et dizaines de posts. Tout autant d’articles inondant les médias d’actualité ; des interventions improbables par quiconque n’est pas invité à parler ; des trailers dignes des plus grosses productions hollywoodiennes ; des messages de soutien, de haine, de désespoir… bref, le package complet pour promettre une nouvelle saison d’absurdité et de défis à couper le souffle.

Pourtant, cette année, ce sont les bookmakers qui se frottent les mains, car sous le sapin, Booba et Kaaris ont reçu de jolis gants de boxe. Inspirés, les deux artistes n’ont pas perdu de temps pour organiser ce qu’ils teasent comme le « Combat du siècle », auquel on pourrait ajouter les adjectifs « fructueux », « improbable » et « inespéré ». Ici, pas de magouilles en coulisses ou d’annonces surprises, la moindre avancée est publiée et mise en avant. Tout doit être clean, et chacun des deux artistes s’emploie à démontrer toute son implication dans l’organisation du combat.

Lequel, hautement médiatisé, constitue une juteuse source de rentabilité. Pour que les médias continuent à gonfler leurs statistiques, pour les que les fans soutiennent leur artiste dans des élans d’hooliganisme, pour que la France puisse pouffer entre deux actes des gilets jaunes, pour que Kaaris et Booba mettent un terme à leur rivalité une bonne fois pour toute : « On veut la bagarre ! »

Les dix meilleurs featurings de Booba

Le rap, ça paye bien

Vous pouvez fouiner tant que vous voulez dans les catégories « Rap » des grands médias d’actualité nationaux, difficile de trouver autre chose que du Booba et Kaaris depuis l’été 2018. Et pour cause, la confrontation des deux artistes s’avèrent particulièrement lucrative. De BFM TV au Figaro en passant par L’Express, tous se penchent avec un certain professionnalisme sur l’histoire de ces deux artistes prêts à régler leur différend dans une cage. Qui plus est, quelques mois après avoir déclenché l’affaire la plus improbable et médiatique de l’année, à Orly.

Et si, comme le répétait intelligemment Disiz sur le plateau d’On n’est pas couché, « on aimerait bien avoir autant d’informations sur l’affaire d’Adama Traoré, mais bon, apparemment ça intéresse moins », difficile de pointer du doigt ces médias chargés de couvrir l’actualité française quelle qu’elle soit. Le rap a beau se plaindre à tue-tête de son traitement dans les médias généralistes, force est de constater qu’il a tout de même une sacrée faculté à tendre le bâton pour se faire battre. Ces journaux, tels des traders aguerris, sont parfaitement conscients de la popularité des deux artistes et savent miser sur les bons chevaux. Une nouvelle fois, vues la popularité des articles sur le sujet, difficile de les contredire.

Dans le rap lui-même, excepté Booska-P qui préfère se tenir à quelques pas des clashs, (et OKLM pour des raisons logiques) les médias ont sensiblement gonflé leurs statistiques depuis les fêtes et l’amorce du combat. Sincèrement, on pourrait même dire que la récupération de l’affaire dans de grosses cylindrés traditionnelles permet un traitement plus professionnelle, plus aboutie. Les enjeux sont clairement mieux explicités, avec l’appuie de spécialistes du genre, bien plus que le côté très second degré du rap français à l’encontre du combat.

Jusque-là, l’affaire est suffisamment auto-suffisante pour que les médias n’aient pas trop à forcer dans l’écriture de sujets invraisemblables. Mais nul doute que, d’ici avril, date présumée du combat, la hype ait le temps de s’essouffler pour que les articles deviennent de moins en moins pertinents, et tout aussi insupportables. De toute manière, une fois l’idée lancée, peu importe l’issue qu’elle aura, elle saura trouver de la matière pour être rentable sur l’intégralité de l’année 2019. Le moindre détail échappant à la promotion des deux artistes étant suffisant pour générer plusieurs milliers de clics.

Les fans dans la peau de hooligans

La musique est un terreau de conflits. Bien avant la bataille d’Orly, de nombreux groupes et artistes se foutaient sur la gueule, ou s’insultaient, pour des problèmes d’égos ou simplement parce qu’ils ne s’aiment pas. Le rap, dont l’une des artères principales trouve sa folie dans les battles décuple ces sentiments. 2pac et Biggie sont certainement morts à cause de la musique. Toujours aux States, Chris Brown et Soulja Boy avaient déjà prévu de se foutre sur la gueule, bien avant les Français. Bref, la rixe physique de Booba et Kaaris n’a rien de si spectaculaire, outre le fait qu’elle soit incroyablement médiatisée.

L’idée du combat n’a pas franchement la même réception chez tous les fans. Certains s’en amusent, d’autres trouvent ça déplorables mais une grande partie est tout de même à fond dedans. Parce que les deux artistes sont fédérateurs et disposent de fan-bases puissantes. Fidèles et loyales, celles-ci se rangent officiellement, parfois même avec virulence, derrière leurs artistes favoris. Les commentaires sont tout de même sacrément impressionnants : souvent, les fans ont de suite évincé tout enjeu musical pour appréhender le combat comme s’il était annoncé par deux boxeurs professionnels. Les deux étant assez proches du milieu des arts martiaux, leurs communautés disposent des codes principaux qui permettent de transiter vers l’octogone.

Nul doute que si le combat a lieu, la salle sera bondée d’un public qui aura choisi son côté. Le combat de boxe, plus que les clashs, aura au moins pour mérite de sceller officiellement la brouille. Il y aura un vainqueur et un perdant. Point. Les joutes verbales relèvent plus de la subjectivité, et les fans sont largement influencés par l’artiste qu’il préfère. Là, au moins, les gants auront raison des mots. Tristement peut-être, juste de quoi sortir des banderoles frappées des punchlines des deux artistes.

Photo : Fifou

Et le rap dans tout ça ?

À l’époque de la bataille d’Orly, on évoquait déjà que le grand perdant de l’histoire était le rap. Mais là, très sincèrement, on a l’impression que le rap, on n’en a plus rien à foutre. Orly avait ce côté spontané, très « règlement de compte ». Deux gars qui se retrouvent, qui ne s’aiment pas, et qui en viennent rapidement aux mains. Ils avaient été jugés, l’affaire avait largement entaché l’image du rap et les deux semblaient s’être plutôt calmés sur leurs réseaux sociaux respectifs.

Cette idée de combat est un sévère coup de pied dans les testicules des promesses effectuées à la rentrée. Mais encore une fois, peu importe. Ici, on est beaucoup moins dans le rap que dans le pur entertainment. Les vidéos réalisées, la récupération du combat par Cyril Hanouna, cette espèce de transparence complète mais invraisemblable : tout transpire le divertissement. Le rap n’en est pas franchement perdant parce qu’il n’est même pas mis sur la table. À la rigueur, la confrontation ternie l’image des deux rappeurs, et encore.

À Orly, c’était un joyeux bordel dans un aéroport, lieu public, qui choquait. L’amalgame entre le combat de rue et le hip-hop était tellement simple qu’il en était franchement évident. C’est pour ça que cette bagarre devenait un sujet tabou dans le rap. En revanche, cette affaire, beaucoup plus business qu’urbaine, parvient à s’extraire d’une sphère rap qui, on l’espère, en ressortira indemne.

 

Pipot, pipot, pipot

Dernier point, peut-être le plus évident : tout transpire la mascarade. Du premier message de Booba, aux réponses insensées de Kaaris, à l’organisation du combat en un temps record, aux tweets de Cyril Hanouna : tout est tellement invraisemblable qu’on est noyé dans une masse d’information qui nous interdit de se poser la moindre question. La vérité est que la bataille d’Orly, qui aurait pu couter cher aux deux rappeurs est le seul fait crédible dans tout ça. Impossible de mentir avec la justice, les tribunaux et les images. La crédibilité de cette affaire judiciaire oblige à croire que tout ce qu’il se passe autour de ce combat est bien réel.

Car sinon, pourquoi ? Certains évoquent une volonté de Booba de passer sous silence la sortie de Surnaturel. Et il est vrai que l’album de Rohff est largement moins médiatisé depuis cette histoire d’octogone. Mais quand même : n’était-ce pas plus simple de sortir un simple son pour le Duc plutôt que de s’embourber dans cette histoire ? D’autres évoquent même un potentiel featuring sur l’album Or Noir part. 3 de Kaaris. Mais difficile de croire que le Duc puisse donner autant de force à un ex-adversaire d’une telle manière. Surtout que Rohff himself a été annoncé sur l’album, donc c’est dead. On aimerait croire que tout ça ne soit qu’un prétexte pour un événement plus lucide et puissant, mais rien n’est possible. Cette histoire est bien réelle.

Maintenant, est-ce que le combat s’organisera ? Franchement, ils semblent assez déterminés et influents pour trouver des solutions au moindre problème technique qui se dressera sur leur route. Vu le paquet d’argent sur le tapis, l’histoire devrait rapidement mettre tous les partis d’accords.

Le beau bordel du rap français en 2018

Crédit Photo : Booba / Instagram

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