Culture
Cinq choses à retenir du reportage sur Anelka sur Netflix
Avec Anelka : l’incompris, Netflix et le réalisateur Éric Hannezo ont nagé dans les eaux troubles de la carrière d’un joueur globe-trotter, au talent aussi prononcé que son caractère.
«Si vous me dites, au fond de moi : « Est-ce que vous pensez qu’il y avait plus en lui ? », je vous dirais sans aucune hésitation « oui »», raconte Arsène Wenger. 1 heure et 34 minutes pour percer le coffre-fort de l’un des secrets les mieux gardé du football français : Nicolas Anelka. Discret et loin d’une France qu’il a fait souffrir (et qui l’a fait souffrir), l’ancien buteur des Bleus s’est longuement confié, à travers un reportage sur Netflix, réalisé par Éric Hannezo. Proches, coéquipiers, entraîneurs : tous se rejoignent pour dresser un portrait post-carrière d’un prodige du football, déambulant entre les exploits et les polémiques. Ce qu’il faut en retenir.
Les débuts du Mail au parc des Princes
Nicolas Anelka vient de la banlieue de Trappes, en région parisienne. Jamais très loin de Jamel Debbouze et également Omar Sy, le footballeur récitait ses gammes enfant, au « Mail », un étendu d’herbe où il se retrouvait avec ses amis autour d’un ballon. «Au Mail, les grands et les petits jouaient, se souvient Omar Sy. Et Nico’ jouait avec tout le monde : les petits et les grands». Comme le symbole d’un talent qui le mène, à 13 ans, jusqu’à Clairefontaine. Puis, jusqu’au club de la capitale, le PSG, avec qui il va fouler pour la première fois la pelouse à l’âge de 16 ans… et marquer son premier but. «Ce qui m’a marqué, moi, poursuit l’acteur, c’est de voir que ton pote, il a le niveau. Il joue avec des darons et il a le niveau».
L’échec de 1998
En 1998, après une bonne saison avec Arsenal, Nicolas Anelka fait partie des 28 joueurs pré-retenus par Aimé Jacquet pour participer à la Coupe du monde en France. Il n’a alors que 19 ans. Il finit par être convoqué par le sélectionneur avec les autres joueurs qui ne disputeront pas le mondial. La seule justification d’Aimé Jacquet selon les dires de l’attaquant : «Toi, c’est normal». «Je ne sais pas si les mecs se rendent compte de ce que ça veut dire, et de ce que ça peut créer dans la tête d’un jeune, avoue-t-il. De dire « Toi, c’est normal », sans explication, si mentalement, tu es faible, peut-être que c’est une carrière qui est morte». Il fera toutefois partie de l’aventure deux ans plus tard, en 2000, lors du championnat d’Europe remporté. «J’étais là pour être performant sur le terrain, ça n’a pas été le cas. J’ai participé, oui, mais je n’ai rien apporté. Si je pouvais retirer ce titre-là sur mon palmarès, je le retire facilement.»
«Le plus gros transfert de tous les temps»
Après des débuts impressionnants à Arsenal, Nicolas Anelka finit par rejoindre le Real Madrid pour 220 millions de francs. Le plus grand transfert de tous les temps. «Je ne m’imaginais pas avec autant de monde pour moi», balbutie l’international français lors de sa première conférence de presse. Accueilli en héros, il déclare désormais : «J’ai compris ce que c’est d’être une star quand je suis arrivé au Real de Madrid. Et j’ai détesté». Sa seule saison en Espagne sera truffée de déceptions : à son domicile, Anelka est perpétuellement traqué par les journalistes. Décevant sur le terrain, il finit par rentrer en conflit avec sa hiérarchie qui refuse d’instaurer un dialogue. Après 45 jours de mise à pied, il sera pourtant décisif lors des demi-finales de Ligue des Champions, avant de soulever le titre. Son seul sur la scène continentale. «C’était tôt dans ma carrière. Très tôt. Peut-être trop tôt. Je n’ai pas apprécié ce moment-là à sa juste valeur. Je ne savais pas que ça allait être la seule que j’allais gagner.»
«Je sens qu’il va se passer un gros truc»
Avant le mondial de 2010, Nicolas Anelka prend part à deux confrontations contre l’Irlande pour s’envoler en Afrique du Sud. Un match retour ponctué d’un geste désormais emblématique : une main de Thierry Henry qui emmène le but égalisateur de William Gallas. Un moment qui semble marquer une fracture entre Nicolas Anelka et les médias français. «Peut-être que les autres nations allaient le tailler, dans la presse, mais on attendait des Français en eux-mêmes, un soutien. Et ça a été le contraire. Ça a été une tuerie pas possible. Il s’est sacrifié pour sa nation, pour qualifier son pays, les siens, pour la Coupe du monde, et on lui crache dessus.» Après cet épisode, Nicolas Anelka aborde difficilement la préparation du mondial. Médiocre lors des préparations, il voudra même secrètement quitter le navire, retenu par Patrice Evra. «Il m’a dit « Pat’, je te promets, je sens qu’il va se passer un gros truc».
«L’entraîneur a fui»
Ce gros truc, c’est certainement le plus terrible épisode de la carrière de l’attaquant, en pleine coupe du monde 2010. Après une mauvaise mi-temps contre le Mexique, il est sorti par Raymond Domenech. Plus tard, L’équipe publie sa Une désormais culte, avec ses insultes supposées : «Va te faire enculer sale fils de pute». «Je regarde mon téléphone et je me dis : « Attends, mais il y a marqué ça là ? C’est pour de vrai ou tu rigoles ?», demande-t-il à un proche lorsqu’il reçoit la Une. Pris dans une tourmente médiatique sans précédent, Anelka et ses coéquipiers, qui réfutent formellement les faits avancés par L’Équipe, organisent en petit comité une réunion avec le sélectionneur. Mais il ne viendra jamais. «L’entraîneur a fui, s’épuise William Gallas. Malheureusement, il faut dire ce qui est : tout le monde le cherchait dans l’hôtel pour qu’il y ait cette réunion entre Nicolas et l’entraîneur.» Finalement expulsé du mondial par le président de la fédération, Nicolas Anelka tire des conclusions terribles, dix ans après. «Ils se sont permis beaucoup de choses avec moi. Cette Une là, avec ce gros mot comme ça, je trouve ça extraordinaire. Ça n’arrivera plus», prévient-t-il.
Et si Raymond Domenech a finalement avoué plus tard, lors d’une autre émission, que ces mots étaient faux, Nicolas Anelka rit jaune. «Il l’avait dit dans le rapport à la fédération. Je pense que la presse le savait, mais personne n’a rien dit». Et à son avocat, maître Stéphane Hasbanian de conclure : «Si on avait prêté de tels propos à n’importe quel autre personne que Nicolas Anelka, le quotifien L’Équipe aurait été condamné».
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