Musique
Iyad Bgx : portrait d’un créatif en quête d’expression
Entre deux tournages, on a réussi à intercepter Iyad Bouzommita, A.K.A @Iyadbgx sur Instagram, pour parler de son parcours atypique dans le monde de la photographie et de la réalisation vidéo.
Photographe, réalisateur, scénariste, directeur artistique : du haut de ses 22 ans, Iyad est l’un des créateurs les plus actifs du milieu. Originaire de Bagneux, le jeune artiste a collaboré avec des noms prestigieux, de PNL à Lil Nas X ou encore, dernièrement, Kerchak et Ibé. De ses premières photos de Pop Smoke à la Fashion Week à 17 ans à la création de sa marque de vêtements, retour sur un parcours fulgurant.
Ton parcours dans le monde artistique est assez singulier. Tu as amorcé ton chemin très jeune. Quel a été le point de départ ?
Pour tout te dire, l’aventure a commencé un peu par hasard. De base, je piquais l’appareil photo de mes parents quand j’allais faire de l’urbex avec mes potes. J’aimais bien les prendre en photo pendant nos traversées, histoire d’avoir de souvenirs. On faisait les toits de Paris et, au fur et à mesure, on est devenus des pros dans ce domaine-là. C’est grâce à mes photos que je suis devenu un peu connu sur Instagram et quelque temps après, truc de fou : il y a Puma US qui m’envoie un message pour me demander si je suis chaud de faire une campagne sur les toits de Paris pour eux. À ce moment-là, j’avais 16 ans et c’est cette opportunité-là qui m’a fait comprendre qu’il y avait un tas de choses à faire dans ce milieu. En gros, ça m’a donné envie de faire ça de ma vie : prendre des photos pour les marques et les gens que je kiff. Ce qui, petit à petit, m’a amené à faire des collabs avec Adidas, puis Nike.
Et à quel moment tu bascules dans le monde de la musique ?
Pour le coup, mon chemin est vraiment atypique. Je suis tombé dans le milieu du rap américain, avant celui du rap français, lors de ma première Fashion Week. C’est une amie qui a réussi à me faire entrer là-bas quand j’avais 17 ans et j’ai pu y faire mes tout premiers portraits de Pop Smoke ou Offset, par exemple. C’est marrant car j’ai commencé à m’intéresser au rap français avec Interlude, c’est la famille ! J’ai pris énormément de photos pour le média avec Squidji, Sneazzy, Trippie Redd, Kalash, Kaaris…
Justement, tu as pu t’essayer à différents exercices, photographier plusieurs personnes de différents milieux… Selon toi, qu’est-ce qui fait une bonne photo ?
Ce que j’aime le plus dans la photo, ce n’est pas forcément le décor ou l’angle, c’est surtout le moment. J’aime capturer un moment précis et le transformer à ma manière. Ce qui est drôle, c’est que, quand tu es dans un lieu avec plein d’autres photographes et que tu jettes un œil aux photos qui ont été prises par tous, il n’y en a aucune qui ressort pareil. C’est ça que j’adore. Chacun retransmet son énergie, sa personnalité et capture un instant différent.
Et si tu devais choisir un seul instant que tu as capturé ?
Je pense que ça serait le Sunday Service Choir de Kanye West. C’était en 2020. Je suis arrivé à Barbès, dans une salle ultra sombre, sans vraiment trop savoir pourquoi on m’avait dit de venir. Et quand j’ai vu Kim Kardashian, sa sœur et Oliver Rousteing dans les gradins, j’ai capté. Kanye est arrivé avec plein d’hommes et de femmes en beige pour chanter une sorte de grosse chorale. L’énergie était folle ! J’ai pris mes photos sur le vif et j’ai adoré capturer cette atmosphère. Je choisis cette photo parce qu’au-delà du fait d’aimer son esthétique, c’est aussi le moment que j’ai passé que j’ai aimé.
Iyad : «Depuis tout petit, je dessine, j’adore tout faire par moi-même»
En plus de la photographie, tu t’es récemment lancé dans la réalisation de clip et la direction artistique. Qu’est-ce qui a motivé ce choix ?
De fil en aiguille, j’ai eu l’envie de me diversifier et de m’exprimer encore plus en me lançant dans la réal’ et la DA au sens large. Depuis septembre 2023, j’ai pu bosser sur la DA de certains projets comme celui de Jeune Morty par exemple.
C’est tout un tas de nouvelles compétences à maîtriser. Tu considères que tu as appris sur le tas ?
Carrément. J’ai forcément fauté sur certaines choses, mais j’ai appris grâce à ça. Je regarde beaucoup de « Behind the Scenes », de Making-off et je m’inspire de plein de gens comme Cole Benett par exemple, qui montre vachement les dessous de ses projets. En gros, j’essaie de me former seul sur tout ce qui englobe la création, de la technique à l’artistique.
Et concernant l’esthétisme et l’imagerie des projets sur lesquels tu travailles en général, tu as des références bien précises ?
Que cela concerne la photo ou la vidéo, je m’inspire beaucoup de Gunner ou Elie Kimbembe. J’adore le fait qu’ils prennent uniquement des photos et vidéos sur le vif. Et, dans ma manière de concevoir les clips, je dirais que j’essaie de proposer un mélange entre Laylow – dans la manière dont ses clips sont scénarisés – et Tyler, The Creator – dans les couleurs et les images fortes qu’il utilise – . J’ai vraiment envie de faire des clips qui ressemblent à des minis films, un peu à la manière de Childish ou Varnish.
D’ailleurs, dernièrement, j’ai pu être sur la réal du teaser d’Ibé qui a lancé sa série PDSOUT et sur son premier épisode « PDSOUT#1 » avec Kerchak. Toutes les inspirations que je t’ai citées, j’ai essayé de les retranscrire au mieux dans ces clips. En fait, j’ai voulu proposer des sortes de courts-métrages avec une esthétique travaillée et un storytelling bien réfléchi. Ça manque un peu en France, je trouve.
Finalement, les étoiles se sont plutôt bien alignées depuis tes 16 ans. Que ce soit voulu ou non, les opportunités n’ont jamais cessé d’arriver jusqu’à toi.
C’est clair. Vu que j’ai commencé tout ça très jeune, ça fait que j’ai pas mal d’anecdotes de fou. Par exemple, j’ai pu accompagner PNL à Bercy et à We Love Green grâce à leur cousin qui s’est intéressé de prêt à mon travail et avec qui je m’entends super bien aujourd’hui. On était seulement 3 photographes à être accrédités. C’est fou. Et ce sont tous ces événements qui m’ont fait comprendre que c’était un métier parfait pour moi : l’atmosphère est détente, dans le sens où je peux être moi-même et aussi créatif que je le veux, et je bosse pour des gens que j’admire. Depuis tout petit, je dessine, j’adore tout faire par moi-même. Et maintenant, de voir que ce que je fais est considéré et reconnu par des professionnels, c’est génial.
Donc aujourd’hui, on peut dire que tu vis de ta passion ?
Ouais, on peut dire que j’en vis ! En fait, je vis d’une sorte de triangle artistique que j’ai mis en place : il y a la photo, ma marque de vêtements, et ma boite de production et de direction artistique. Mais c’est vrai qu’au début, c’est assez compliqué de vivre de la photo parce que quand tu te lances, tu comprends vite que ce n’est pas un métier rentable. Ça coûte extrêmement cher en matériel, tu n’es pas forcément payé au début, et puis ça te prend beaucoup de temps. En plus de ça, ce sont beaucoup de compétences à maîtriser en même temps. Outre les compétences techniques, tu dois savoir capturer le bon moment, savoir diriger quelqu’un pour obtenir le meilleur potentiel, être là au bon moment, etc. Ce qui m’a fait arriver là où j’en suis aujourd’hui, c’est clairement la passion et le fait que j’y ai cru jusqu’au bout.