Interviews
Squidji : «Je suis pas un leader, je suis un porte-parole»
À l’occasion de la sortie de son premier album Ocytocine, on a parlé amour sur les réseaux sociaux, introspection et féminisme avec Squidji.
Avec son premier projet long Ocytocine, Squidji dévoile une bande-son aux couleurs de sa vie, entre réflexions apaisées, ambiances nocturnes, doutes profonds et rencontres. Squidji et sa voix miel, accompagné d’Ikaz, Ponko et Prinzly à la production, offre un univers mi douceur mi exaltation. Il explore avec sagesse et maturité les relations qui gravitent autour de lui. D’ailleurs, l’ocytocine est une hormone produite lors de toutes relations affectueuses. 17 titres aux allures de véritables montagnes russes, d’un Paris noir à un paradis bleu. Squidji y attrape son oxygène en vol et nous parle d’amour. Ajoutez à ça des interludes et vivez l’expérience unique d’Ocytocine. Que le voyage commence, attachez vos ceintures, et rentrez dans le cerveau du crooner parisien.
Tu sors ton premier album le 28 mai, tu te sens comment ?
Je suis enthousiaste. Je suis impatient. J’ai envie de savoir l’avis du public, j’ai envie de voir ce qu’ils aiment et ce qu’ils aiment pas. Il y a des sons qui sont un peu des prises de risques dans ce projet. J’ai juste peur, mais c’est une bonne peur.
Pour ceux qui ne te connaissent pas encore, ça a commencé comment la musique pour toi ?
Ça a commencé en 2015. Je faisais des freestyles sur Facebook. Après j’ai fait la connaissance du groupe Ultimate Boyz avec Roshi, ça m’a poussé à faire des sons. J’avais besoin d’un groupe avec qui kicker. J’ai fait un premier son sur Soundcloud qui a bien pris, c’est « Groupie ». Il a bien pris parce que l’un des anciens DJ de Booba la repost. Après j’ai migré vers Youtube et Spotify.
R’n’b, hip-hop, trap, chanson française mais aussi rumba congolaise grâce à ton père, quelles sont tes références et tes inspirations ?
Ce qui m’inspire, c’est tous les sons que j’écoute. C’est varié, j’écoute vraiment de tout. Et même quand c’est un son que j’aime pas, j’essaie de capter pourquoi ça plait, pourquoi le son marche. J’ai une culture musicale qui est vaste, grâce à mes darons aussi. Mon daron surtout écoutait des chanteurs de variété, Enrique Salvador tout ça, et à coté, il écoutait beaucoup de rumba. Je me suis fait bercer toute mon enfance par ça. Aujourd’hui, je cherche toujours le meilleur, même des sons que les jeunes d’aujourd’hui n’écoutent pas forcément.
Et pour ce premier album, c’est quoi qui t’a le plus inspiré ?
Un peu de tout. Par exemple « Cicatrices », c’était à Fréjus : j’ai fait écouter un son à Prizzly. En fait, il y avait un son de PartyNextDoor qui me rendait fou, je lui ai fait écouter comme référence pour qu’il s’inspire de la prod. Puis, il a rajouté son truc et ça a fait « Cicatrices ». Donc c’est un mélange de tout.
«Une femme qui est vraiment là pour moi c’est mieux»
Tu avais déjà dévoilé deux extraits de l’album, “Oxygène” et “Insta”. Dans “Insta”, tu parles de l’amour à l’ère d’Instagram, tu penses que c’est possible de trouver l’amour sur les réseaux?
Bien sûr. Moi là, j’ai fait la connaissance d’une fille qui habite à Bruxelles. En octobre, je suis partie en séminaire à Bruxelles, et j’ai fait sa connaissance. Avant ça, elle m’avait déjà mentionné dans sa story, j’ai bien kiffé (rires). Après on a parlé, je lui ai dit « Vas-y viens ». Comme par hasard, le studio était à 5 minutes de chez elle. Et depuis octobre, on est collé. J’étais chez elle là depuis une semaine. Elle est là pour moi, elle me suit de partout. Ça me permet d’être plus carré. Je vois que y a de la visibilité, ça veut dire plus de femmes. Une femme qui est vraiment là pour moi c’est mieux.
Tu les as clippé les deux d’ailleurs. À la réalisation, on retrouve Léo Joubert. Vous arrivez à créer une ambiance assez unique, comment ça se passe entre vous deux ? Vos idées se complètent facilement ?
On se connaît depuis quatre ans. Si je veux faire un clip, je ne pourrais pas faire avec quelqu’un d’autre. Visuellement parlant, ça va toujours le faire. Et en plus de ça, c’est un poto. Ce qui me saoule c’est qu’en ce moment on se voit plus en mode taff qu’autre chose, mais ça me fait trop plaisir de taffer avec lui.
Tu comptes clipper d’autres titres de l’album?
J’espère. J’aime bien le son avec Lala. J’aimerais bien le clipper. Tu vois… Marseille, soleil, tout ça. Ça serait gang.
«Quand je sors de la cabine, je me sens libéré»
Dans ce premier album, on retrouve l’univers que tu t’es façonné à travers les années. Mélange entre la douceur du RNB et la trap pure et dure. On retrouve des sons doux, dans lesquels tu te livres et en même temps le coté ambiance, plus rap finalement, c’est cette variété là qui te nourrit ?
C’est important qu’il y ai des sons variés dans l’album. Le but c’est de pas ennuyer l’auditeur avec le projet. On a rajouté des interludes aussi, c’est carré.
Tu te livres complètement, à chaque son on en découvre un peu plus sur toi, mais au final tu te dis plutôt introverti, c’est qu’en musique que tu arrives à autant te livrer ?
En vrai, je suis réservé. Je n’aime pas trop raconter ma vie. Je trouve que quand tu racontes trop ta vie, ça montre trop des points faibles et moi je n’aime pas ça. Le fait de rien dire comme ça, je continue à être inspiré, j’ai toujours un truc à dire en musique. Quand je sors de la cabine, je me sens libéré.
«On a tous un point en commun, c’est la musique»
Comment s’est passé l’écriture? Tu racontes beaucoup d’étapes de ta vie, c’est quand même un album très personnel. Décris-nous ton processus.
La moitié des sons ont été faits à Fréjus en mode séminaire. L’après-midi, soleil, ça mange, après ça fait des prods. Après je me pose, avec mes airpods, devant la mer, transat, bédo, et j’écris jusqu’à très tard.
C’est les prods aussi qui t’inspirent beaucoup? L’album a été produit par Ikaz, Ponko et Prinzly. Comment ça s’est passé avec eux?
Oui, c’est les prods qui m’inspirent. Si j’ai vraiment un truc à dire et que j’ai déjà taffé les paroles, je les adapte au flow. Les producteurs, ils sont tous adorables. Il y a quand même le producteur de Laylow, Damso et tout et en fait ce sont des mecs super humble. J’ai envie d’être comme eux plus tard. Je veux être humble comme ça. Je les vois comme mes grand frères. On a tous un point en commun, c’est la musique. C’est gang.
«J’ai envie aussi que ça parle à tout le monde»
En tout cas l’album démarre très fort, sur le titre “NOUS” on retrouve des chants d’église. Ce titre il parle de quoi finalement?
Dans le son on pourrait croire que je veux fédérer une nation mais non le son il s’adresse aux artistes, peu importe qui font de la musique, du rap, de la peinture… Le son il s’adresse à eux, quand je dis «Reste avec nous, tu n’es plus la seule maintenant», je dis reste avec nous on est des artistes, on est une famille. Je suis pas un leader, je suis un porte-parole.
Il y a aussi des titres assez dansant comme “Southside” ou “Stripper”. Tu souhaites aussi faire danser ton public?
C’est important ça. Le projet il va sortir l’été, on a envie de danser, de bouger nos têtes, de turn up. En plus il y a eu le confinement, c’est important d’apporter ça.
Comment s’est passé l’écriture pour un titre aussi personnelle que “A.M.O.U.R” ?
J’ai vraiment pas réfléchi quand j’ai écrit le son. J’ai essayé de penser à mes anciennes relations. Si je bédave, qu’il fait nuit et que je l’écoute, je vais pleurer wesh. Il est trop profond. J’ai envie aussi que ça parle à tout le monde.
J’aimerais qu’on parle aussi du titre « Cicatrices » avec Lous and the Yakuza dans lequel on retrouve des paroles très fortes sur une mélodie envoutante.
Mon directeur artistique a appelé une journaliste féministe pour m’aider à écrire, me donner des conseils sur le texte, pas dire des trucs trop bizarres. C’est quand même un thème qui parle d’agression, de violence. Lous c’est important qu’elle soit là, je pouvais pas assumer ce son, alors que j’ai rien vécu de tout ça. Lous c’est un peu la porte-parole, c’est important qu’il y ait un feat et que ça soit une femme. Je voulais parler de ça, pointer du doigt quelque chose sans trop en faire.
«On voulait faire un cinéma mais auditif»
Il y a aussi des interludes dans l’album, 4 au total, (enfance), (money machine), (la drague), (chrysalide). Pourquoi ce choix?
J’ai kiffé le projet de Laylow et mon directeur artistique aussi. On s’est dit pourquoi pas faire un projet concept. On voulait faire un cinéma mais auditif. On a demandé aussi à Jäde de participer au truc, elle l’a fait avec plaisir. Et toutes les autres voix c’est moi et j’ai pris vraiment du plaisir. Je me sentais comme si je faisais une voix off au cinéma.
Et le cinéma, ça t’intéresse ?
Ouais ouais (rires) mais ça c’est pour plus tard.
«Je sors de ma chrysalide»
Avec ton dernier titre “Changer”, tu commences direct en disant «je suis plus le même qu’avant», tu fais même référence à ton époque Soundcloud, ce morceau a une grosse symbolique pour toi ?
C’est symbolique dans le sens où c’est un son qui achève tout ce que je dis dans le projet. Il y a un scénario, je tombe amoureux d’une meuf, après c’est compliqué, puis pour oublier tout ça je vais rider dans Paris en Subaru, en suite je sors de la voiture et il pleut il fait moche. Puis quand je dis que j’ai changé c’est à cause de la strippeuse que je rencontre. Elle me raconte sa vie, elle me dis qu’elle a des cicatrices, qu’on lui a fait des trucs de ouf.
T’as l’impression d’être dans une période de changement, d’où l’image de la chrysalide dans le dernier interlude?
Ouais, en apprenant tout ça, je sors de ma chrysalide. C’est tout ce qui s’est passé dans le projet, ça fait de moi une nouvelle personne. Même pendant que je faisais le projet, j’ai appris pleins de choses, on m’a donné pleins de conseils à Fréjus, à Bruxelles. C’est un projet qui marque mon évolution, vers un deuxième album.
Alors la suite c’est ça, le deuxième album?
Je pense. J’ai envie de faire un truc sur la spiritualité. J’ai peur que les petits ils ne captent pas mais j’ai envie de faire ça. Ma meuf est vraiment dans la spiritualité et elle dit des trucs de ouf. Mais est-ce que ça va plaire au label ? On verra.
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