Interviews
Leonis : «Je suis l’espoir de ma ville»
A l’occasion de la sortie de son dernière mixtape Sherhood Part.2, Leonis nous avons rencontrer Leonis afin d’en savoir plus sur le rappeur et son univers.
Quelques heures avant sa première date solo à La Boule Noire, nous avons eu la chance de retrouver, un rappeurs autant bercé par ses premières inspirations que par la modernité du rap d’aujourd’hui : Leonis. Alors qu’il vient de sortir sa deuxième mixtape Sherhood Part.2, le rappeur du 77 nous a raconter son univers et la construction de son dernier projet avec un naturel troublant, tant on ne pouvait s’attendre à ce qu’il doive monter sur scène quelques heure plus tard. Leonis c’est un rap authentique, soucieux d’hier et de demain, c’est un rap qui n’est qu’au prémices de son évolution.
On se retrouve la veille de ton concert à La Boule Noire et de la sortie de ta nouvelle mixtape, comment tu appréhende cette date ?
Je suis pressé, je suis sûr de mon projet, donc j’ai juste envie que les gens le découvrent.
Depuis 2020, on peut constater que tu enchaînes les sons, il y a peine 6 mois d’intervalle entre ta première mixtape et Sherhood 2. Pourquoi ce choix ?
On essaie d’être actif de plus en plus, le COVID nous a mit un coup, j’ai sorti éponyme le 31 Janvier 2019 et en mars on était confiné, alors qu’en janvier je passais dans les 11 rappeurs à suivre de Booska P. Le projet commençait à streamer et le COVID m’a stoppé, mon équipe m’avait proposé de sortir un EP pendant le confinement, mais j’ai pas voulu. Je me suis dit que c’était pas grave, j’allais me concentrer sur ma mixtape. Mais maintenant la machine est relancée !
Comment as-tu construit Sherhood 2 dans ce court intervalle ?
J’ai commencé à le travailler fin septembre, mais alors que j’avais déjà des sons en stock, j’ai tout recommencé à zero pour Sherhood 2, dans ce projet il y a que du neuf. Alors que dans le premier j’accumulais des sons depuis le COVID.
On a pu observer que sur ce projet tu es allé plus vers la mélodie et les refrains chantés. C’était une étape importante à franchir selon toi ?
C’est vrai que sur la généralité de l’EP je chante un peu plus mais c’est déjà quelque chose que je faisais un peu depuis mon premier EP. Mais dans ma musicalité c’était important de franchir cette étape de ne plus faire que du rap kické, mais aussi pour moi, je kiffe quand je chante. JE suis client de ces sons-là, donc pourquoi ne pas le faire ? Si a 18h j’ai envie de faire un son d’amour et qu’à minuit je veux faire un son drill, je le fais. Je prends en compte que mes humeurs et ce que j’ai envie, je me demande ce que le public va penser. J’avais beaucoup de beatmaker qui avaient des mélo inspirantes, comme Dito, SoEazy et Syger, ça aurait été dommage de juste rapper sur leurs prods.
On t’a vu apparaitre dans le paysage rap en 2019 ton arrivé a su étonné par ton rap tranchant et authentique, à l’heure où la tendance était davantage à la mélodie légère. Comment tu explique l’engouement relatif qui tu réussi à installer ?
Moi ce qui m’a le plus surpris dans cette période, c’est quand j’ai été choisi dans les 11 rappeurs à suivre de Booska P. C’était un programme regardé, que même moi je suivais. Mon EP était même pas sorti, j’avais sorti que 4 clips et ils m’ont sélectionner.
Comme on vient de le dire, tu ne t’es pas écarté de ta ligne de conduite depuis ton début, tu es majoritairement orienté vers le kickage. Depuis plus d’un an maintenant on peut observer un retour du rap un plus traditionnel, comment tu observes ce phénomène ?
Il y a moins de fast-food, le rap revient fort, je suis content, c’est mon point fort. Si on continuait dans la lancé de 2017-2018, le rap allait baisser en qualité, maintenant faut que ça se stabilise et qu’on prenne des grosses claques de rap français.
D’ailleurs pour parler un plus des thématiques que tu abordes, tu mêles les traditionnels du rap français en y ajoutant une part de réalité. Tu ne glorifie pas la rue, tu ne te définis pas non plus comme un voyou, un de tes sons s’appelle même « intérimaire », tu expliques simplement ta réalité.
J’ai pas envie de faire de la musique « fast food » ou de me faire passer pour quelqu’un d’autre, je veux que ma musique soit de plus en plus mature et que je parle de moins en moins du quartier et si je t’en parle c’est juste pour te toucher et te faire ressentir quelque chose. Il y a des mecs qui ont 35 ans et qui rap la rue, tant mieux pour eux, moi j’ai pas été éduqué comme ça. Faut pas oublier qu’il y a la famille aussi qui écoute les sons et regarde les clips.
L’œil que tes proches ont sur ta musique à l’air d’avoir vraiment une place importante.
Carrément, des fois je peux faire des trucs et me demander ce que m’a mère penserait si elle écoutait ce son. Il y en a qui pense pas à ça, leur seul priorité c’est l’argent.
En revanche, un terme qui revient souvent, c’est le surnom que tu donne à ton secteur, « Sherhood », qui est également le nom de tes deux mixtapes. Pour cette appellation ?
On est une petite ville dans 77, Avon c’est collé à Fontainebleau, et on est au milieu de la forêt. Sherwood, c’est la forêt où Robin des Bois se cachait, j’ai trouvé ça intéressant de rapprocher cette image de mon quartier comme on est aussi au milieu de la forêt et qu’on est une ville assez pauvre comparé à Fontainebleau.
Tu te vois comme une sorte de Robin des bois alors ?
Je me vois pas comme un Robin des Bois, c’est la démarche de sons « Sherwood » qui m’a plu dans l’histoire. Mais la morale de l’histoire m’a touché aussi, Robin des Bois on le voit pas trop, il est discret, je suis un mec comme ça : je me montre pas trop sur les réseaux, depuis que je suis tout petit je marche capuché.
On te sent très attaché à ta ville, jusqu’à aujourd’hui tu tournes encore beaucoup de tes clips dans ton quartier. Tu vocation à être le porte-étendard de cette ville ?
Je suis l’espoir de ma ville ! Je le fais pour moi, mais aussi pour ma ville, les petits qui sont là, d’ailleurs, y’a un petit qui de chez moi qui va chanter ce soir. Je suis obligé, quand j’étais petit il y avait personne qui m’a payé des clips et du studio, je faisais mes affaires juste pour me payer du studio. J’ai envie que les petits se concentre vite sur la musique pour que ça aille tout droit après.
Tu parles un peu comme un producteur, tu te verrais prendre des artistes sous ton aile ?
Produire ça veut dire beaucoup de chose, peut être plus manager, négocier pour eux, je veux pas qu’ils se fassent arnaquer par la suite.
En parlant de tes clips, on a pu remarquer qu’a travers les différentes périodes de ta carrière tu as a su te réinventer à l’image, tout en gardant une cohérence et une authenticité. Entre ton premier EP, les suites de freestyle « Blue » et « Sherhood », on retrouve des couleurs qui te sont propre mais des nouveautés dans les cadres et les techniques utilisés.
Aujourd’hui l’image c’est important dans le rap, mais j’ai pas envie de devenir un influenceur non plus, je garde ma ligne directrice, j’essais d’être moi-même. Je clip majoritairement dans ma ville, mais je vais essayer aussi d’aller ailleurs pour montrer d’autres décors. Moi tout ce que je fais c’est au feeling, les rappeurs ils se prennent trop la tête, il faut que tout soit carré, mais faut que ça reste authentique, que ça vienne de te ressemble et que ça reste spontané. A un moment j’ai pu faire des trucs qui me ressemblait un peu moins et je l’ai vu, quand je regardais, je voyais que je faisais une erreur et je me suis repris.
Sur Sherhood 2 on retrouve un featuring assez étonnant, Take a Mic. Comment s’est faite la connexion ?
Sur Instagram, comme toutes mes connections, j’avais kiffé son morceau « Mec du Hood », je lui avais envoyé un message direct par rapport à ce son. Et le truc marrant c’est quand dans cette conversation on s’est envoyé en même temps le message : « Faut qu’on se pète au studio ». On s’est attrapé vite, il est venu naturellement, ça se sent sur le morceau.
On retrouve également Hatik sur le projet, que tu as réussi à ramener dans ton univers, entre mélancholie et kickage. Comment avez-vous fait ce morceau ?
Ça m’a surpris, et c’est là que tu vois que c’est quelqu’un d’humble, c’est un vrai gars. On s’est parlé par rapport à Validé, la première fois, il devait venir sur Sherhood 1, mais il était sur son album. Quand ma première mixtape est sortie, il a kiffé et on s’est retrouvé pour Sherhood 2. Il est venu seul au studio, on a mis du temps à faire le son, on a pris toute la soirée parce qu’on d’abord beaucoup discuter avant de faire commencer à faire le morceau. C’est la première fois que j’ai pas écris de couplet, j’ai enregistré phase par phase, j’ai même pas le texte sur mon téléphone.
Est-ce que tu peux nous parler de l’Outro, qui détonne particulièrement des autres morceaux du projets ?
C’est peut-être l’un de mes morceaux préférés du projet, c’est qui ressemble le plus à la suite dans l’écriture, dans la façon de poser. Tu vois que c’est naturel, c’est aéré, c’est mon but d’arriver à ce niveau dans la mélancolie. Quand je parle de musique plus mature c’est dans ce sens-là. Je voulais juste parler, je l’ai mis en musique, ça a pris vingt minutes, je me suis enregistré tout seul, je l’ai fait écouter à mon pote, il a validé et on l’a laissé comme ça pour le projet.
Aujourd’hui ça fait plus de deux ans que tu es à fond dans le rap, Sherhood 2 est ta deuxième mixtape, est ce qu’on doit s’attendre à une trilogie ou un album pour la suite ?
On se pose cette question en ce moment, est-ce qu’on fait le premier album ? Mais je crois que non, on va partir sur un Sherhood 3. Les gens commencent à comprendre l’univers Sherhood, on va appuyer sur le concept, et après la partie 3 on va embrayer sur autre chose.
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