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Nahir : «Avec tous les sacrifices que j’ai faits, je ne peux pas m’arrêter là»

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Nahir
David Delaplace

Avant la sortie de Intégral, son premier projet, on a discuté avec Nahir. L’occasion de découvrir une des têtes montantes de la scène francophone.

Nahir, jeune rappeur de Bobigny s’apprête à sortir son premier projet, Intégral, le 5 mars prochain. Après avoir fait beaucoup de bruit dans Rentre Dans le Cercle, la Booska Pefra ou encore avec sa série de freestyle « Fin de couplet », il se mesure enfin à l’épreuve du premier long-format. Ses influences, sa signature, sa manière de travailler et la façon dont il voit sa musique, on a abordé plusieurs sujets avec lui. Un entretien complet, permettant de mieux comprendre le rappeur qu’est Nahir.

Avant la sortie de ton premier projet dans quel état d’esprit es-tu ?

Franchement, je me sens prêt. Y’a une bonne pression et je me sens prêt à le défendre. Je sais que y’a ce qu’il faut pour le défendre musicalement.

Initialement prévu pour le 19 mars, la mixtape sort finalement le 5. Explique-nous la raison de cette avancée de date de sortie.

Il y a eu un leak de la part du distributeur digital ce qui nous a obligé à avancer la date.

Est-ce que ce désagrément te met une pression supplémentaire ?

Oui bien sûr. Il y avait une organisation qui était établie sur plusieurs semaines. Elle est réduite à quatre jours donc forcément ça chamboule tout.

On va reparler du projet, mais je voulais aussi parler de toi. Déjà plus jeune, quelles ont été tes premières influences musicales ? 

Petit, ça a commencé avec du Tupac et pas mal de DMX. Puis je me suis pris le rap français avec Booba ou Rohff. Après j’ai vraiment écouté pas mal de mecs. Salif, Mac Tyer, Despo, il y en a eu plein en vrai.

Dernièrement t’as fait pas mal de bruits avec la série de freestyle « Fin de couplet ». Comment tu les travaille ces freestyles ?

Les « Fin de couplet » c’est totalement différent d’un single à part entière. Les derniers qui sont sortis sont un peu plus travaillés, mais à la base, surtout les quatre premiers, c’est vraiment différent. C’est assez brut, c’est très freestyle. Je fais pas forcément tout ce qu’il y a à faire sur un morceau, que ce soit les backs, les ambiances, etc. Là, ça va faire trois ans que j’ai commencé cette série. Quand je le fais, je veux plus me concentrer sur ce côté freestyle. Même si les derniers sont un peu plus travaillés, ça reste assez cru.

Début février t’as aussi lancé « Fin de Drill ». Est-ce que c’est un truc que tu vas essayer de pérenniser comme les « Fin de Couplet » ?

« Fin de Drill », c’est un truc que je vais faire seulement sur quatre épisodes. Je pense pas que c’est quelque chose que je vais forcément continuer. C’était juste un petit kiffe que j’avais envie de me faire. Je sais que il y a beaucoup de personnes qui m’apprécient sur de la drill, et le projet c’est pas un 100% drill. Sur 18 morceaux, il y en a seulement 4 drill. Donc c’était aussi pour faire plaisir à ce public que j’ai fait cette petite série.

C’est vrai que sur le projet, ça se sent que t’as voulu taper large en terme de musicalité.

Ouais bien sur ! Moi j’ai toujours aimé être polyvalent, et j’aime vraiment pas mal de choses dans la musique. Je ne m’impose pas de limites, et je n’aime pas faire souvent la même chose. En vérité, la couleur change, la musicalité change mais je reste moi-même. La forme change mais le fond, lui, ne change pas.

Cette année 2020 aura été une année charnière pour toi. Entre les 11 rappeurs à suivre, la signature chez AWA et le feat avec Freeze ta popularité est montée en flèche. Que les choses s’accélèrent comme ça aussi vite, est ce que ça te met une pression particulière?

En vérité ça a mis beaucoup de temps. Par exemple, la signature chez AWA elle s’est faite en avril dernier mais avant ça y’avait déjà eu pas mal de propositions de maisons de disques et parfois même un an plus tôt. En fait, y’avait eu mon freestyle Rentre Dans Le Cercle en 2019, et c’est la qu’il y a eu un premier engouement avec des maisons de disques. Mais on s’est pas sentis prêts, donc on a continué à bosser pour arriver à cette signature. Concernant cette année 2020 je l’ai bien vécue, et je considère que ce succès, il n’est pas volé parce qu’il y a beaucoup de travail derrière ça, et j’ai tout fait pour que ça marche. Donc il y a une pression, mais c’est plus la même, maintenant c’est une bonne pression. Maintenant que les regards sont sur moi, est-ce que l’univers va être apprécié ? Est-ce que les gens vont comprendre que Nahir c’est ça et ça sera comme ça sur tous les projets.

Du coup comment s’est faite la connexion avec Freeze sur « Moneygram » ?

En fait, on se connaissait déjà Freeze et moi. On a un entourage assez commun, que ce soit Sazamyzy ou Hype, donc ça c’est fait naturellement. Et surtout ça s’est fait au bon moment pour moi, ça m’a donné l’impulsion qu’il me fallait.

En ce moment, on vit une sorte de renouveau dans le rap. Avec des rappeurs comme Freeze ou Alpha Wann, qui sont des gars beaucoup plus portés sur du rap brut et technique plutôt que des mélodies et qui ont eu pas mal de succès en 2020, on a l’impression qu’une porte s’est ouverte. Comment tu vois ça ? Est-ce que tu penses que ça peut t’apporter à toi et au rap que tu proposes ?

Bien sur ! Comme tu dis, ces artistes là, de par leur succès, ils ont mis une lumière sur un rap plus dur, qui était plus aussi présent. Et moi, dans la musique que je fais, ça peut que m’être profitable. Ils ont même pas ouvert une porte, ils ont réouvert une porte qui était fermée, donc c’est clair que ça laisse l’opportunité à des rappeurs comme moi ou Frenetik par exemple, qui ont quand même une certaine écriture.

C’est aussi arrivé à un bon moment. Le public commençait peut-être à se lasser d’une certaine recette qui revenait souvent.

Y’a de ça. Mais je pense aussi que le Covid a beaucoup joué la dessus. Avant y’avait beaucoup de morceaux assez ouverts, assez festifs mais maintenant qu’on peut plus sortir, ça devient plus compliqué de s’ambiancer. Le climat est un peu plus froid, plus sombre.

L’autre tendance en 2020, évidemment c’est la drill. Comment tu vois l’explosion de cette tendance ? Est ce que tu penses que c’est parti pour durer ou que ça va s’essouffler ?

Alors ça, ça dépend de ceux qui la font. De ceux qui sont mis en avant avec la drill. De comment on la fait. Tout dépend de la qualité, si on arrive à se renouveler dans la drill, trouver des nouvelles sonorités. Je pense que ça dépend de tout ça. Après la musique c’est super aléatoire. Par exemple la trap, tout le monde pensait que ça allait s’essouffler, au final aujourd’hui tout le monde en fait. C’est une question de tendances aussi. Mais aujourd’hui les concepts ne s’essoufflent plus. C’est juste que les concepts d’aujourd’hui viennent se rajouter à ceux d’hier. Que tu suives la tendance, ou que tu restes dans celle d’avant, tu peux t’en sortir. Après pour moi, la drill c’est depuis longtemps. Je m’entraînais déjà à rapper sur de la drill avant que ça explose autant en France. Donc forcément c’est plus simple pour moi.

Du coup, venons-en au projet. Personnellement j’ai été agréablement surpris, parce que je t’ai connu sur des trucs bien kickés. Et en vrai quand j’ai vu la tracklist je m’attendais pas à des noms comme RK ou Hornet. Mais t’as vraiment réussi à ramener ton rap dans leur univers.

C’était clairement le but. Et ça fait écho à ce que je te disais toute à l’heure, concernant l’acceptation de l’univers musical. J’ai d’abord balancé beaucoup de morceaux kickés, j’ai pas forcément beaucoup mis l’accent sur les mélodies par exemple. Mais je pars du principe que lorsque j’invite quelqu’un, il faut un mélange d’univers. A partir du moment où c’est mon projet il faut aussi que ça reste du Nahir dans le fond. C’est important, surtout pour un premier projet je pense, de garder son identité.

En parlant de ça, c’est vrai qu’Intégral c’est une belle carte d’identité de ce que tu vas aussi pouvoir peut-être proposer tout au long de ta carrière. On retrouve des sons un peu plus dansants, d’autres un peu plus personnels et certains beaucoup plus portés sur le kickage. Et à chaque fois on a l’impression que ça fonctionne en fait.

C’était l’objectif. Si je viens avec un premier projet entièrement kické, j’aurais plus de mal à m’ouvrir après. Et ça sera aussi plus difficile à accepter pour le public que si il s’y fait dès maintenant. En arrivant avec un projet comme ça je lance aussi un message. Nahir c’est ça, y’a des morceaux ouverts des morceaux plus sombres, tout ce que j’aime faire en fait !

Pourquoi tu t’es attaché à ce format mixtape plutôt que de directement le défendre comme un album ?

Parce que déjà c’est mon premier projet. En vérité il est travaillé comme un album, sauf que mes albums seront plus particuliers. Il y aura une direction plus poussée. Dans la forme un album peut s’éparpiller, mais dans le fond ce sera encore plus ancré. Mais pour le coup c’est bossé comme un album sauf que sur l’album y’aura peut-être moins de feats par exemple. Sur cette mixtape, je regroupe tout le travail effectué pendant deux ans. Alors qu’un album c’est quelque chose de bien précis, sur lequel tu sais où tu vas direct. La mixtape, c’est plus instinctif. Pour un album, même si la façon de l’écrire ça reste instinctif, la direction est réfléchie. Après j’ai déjà des morceaux de côté pour l’album. Je les ai pas mis dans la mixtape parce qu’ils rentrent dans un schéma plus précis. Parce que je sais déjà que c’est cette couleur que je vais amener à l’album.

Depuis combien de temps tu travailles sur Intégral ? C’est quel son qui a été enregistré en premier ?

Le premier son c’est « Le Bus », et c’était y’a 3 ans ! Mais celui-là du coup on va dire qu’il compte pas. Du coup dans sa globalité, je suis sur le projet depuis 1 an et demi, 2 ans.

Donc t’as vraiment pris le temps de bien le bosser avant d’être sûr de l’envoyer.

C’est ça. Parce qu’à coté de ça, il fallait que je fasse monter mon « buzz », même si j’aime pas dire ça. Fallait que j’attire l’attention, que je fasse mon parcours du combattant. Je voulais pas faire un projet pour faire un projet. Et par rapport à ma manière de travailler, je pouvais pas me permettre de balancer des morceaux, comme ça, dans la nature. Pour moi, c’est important qu’il y ait quelque chose qui se passe.

Qu’il y ait l’exposition qu’il faut pour pouvoir sortir au moment où il faut ?

Exactement. Ne pas se presser, surtout pas. Et à côté de ça, fallait que je fasse les « Fin de Couplet », fallait que je comprenne comment faire ma « propagande », pour enfin en arriver là.

Tu parles de propagande c’est vraiment un mot qu’on entend de plus en plus, finalement plus que promotion maintenant. Comment t’essaies de propager le truc de ton côté ?

Déjà sur les réseaux je suis grave présent. Je balance beaucoup de contenu, je balance beaucoup de clips, j’essaie d’occuper tout les terrains en vérité. Après c’est aussi le public qui décide. Mais maintenant on peut plus me dire « c’est lourd mais on t’écoute pas », parce que maintenant Nahir a un public, quelque chose est en train de se passer. Maintenant, si la qualité est pas là, je peux m’en prendre qu’à moi même.

 

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Du coup sur le projet, il y a pas mal de feats. Est-ce qu’AWA t’as aidé à aller les chercher, ou t’as vraiment été les chercher toi-même ?

Les feats je las ai tous eu moi-même. Hornet m’avait invité à son Planète Rap donc on était déjà connecté. RK on se connaissait déjà un peu, donc il a direct accepté l’invitation, Imen ES je l’ai contactée via Abou Debeing et Gradur on a des connaissances en commun. Et le reste c’est vraiment les frérots, la famille. Nini Mess c’est mon cousin, Rvzmo et C.O.R c’est mes gars de fou. Donc vraiment toutes ces connexions se sont faites super naturellement.

Et du coup à part ces connexions, avec qui tu te verrais collaborer ? 

Franchement je sais pas. En vérité j’ai fait les feats que je voulais pour mon premier projet.

Personnellement, il y a un nom qui me vient en tête. C’est celui de Niro.

Niro, ouais ! Je pense que ça se fera parce qu’on s’entend bien. Juste ça se fera au bon moment.

Au sein de ce projet Intégral, il y a quand même une intro et une outro qui sont toutes les deux assez puissantes. Est-ce que c’est un truc auquel t’attaches de l’importance ?

Oui, ça c’est important. Je pense même pour tous les artistes en vérité. Bien commencer, bien finir c’est la base. Mais en vérité, l’outro quand je l’ai faite je savais pas forcément que ça serait l’outro. Il date d’il y a 1 an et demi, c’est un des premiers que j’ai enregistré aussi.

C’est vraiment une palette super large de tout ce que tu peux proposer depuis 2-3 ans ce projet.

En fait, ce projet c’est un peu un état d’esprit. Y’a beaucoup de thèmes, beaucoup de tests. Et en vérité le fait que « Thérapie », l’outro, se retrouve sur le projet, alors que c’est un état d’esprit d’il y a à peu près un an, ça montre que ça n’a pas changé, ça a toute sa place au final.

D’ailleurs ce genre de morceaux comme « Thérapie », « Comme Avant » ou « Le Bus » c’est des trucs plus personnels. Et alors qu’on avait pas encore vu ça chez toi, dernièrement tu mets un peu plus l’accent sur ça. Pour que le public te connaisse mieux ?

Comme je t’ai dit le projet c’est un état d’esprit. Et avant ça, j’ai pas eu l’occasion de balancer des morceaux comme ça, assez ouverts. Mais quand je suis en studio, que j’écris, je raconte ce que je vis. Donc je fais pas forcément exprès que ce soit personnel. Et au final quand ça l’est et que c’est incorporé au projet, je me dois aussi d’en faire des singles pour éviter un trop gros décalage entre ce qui est balancé avant et ce qu’il y a dans le projet. Par exemple « Le Bus », j’ai choisi de le sortir parce que pour moi c’est le morceau le plus ouvert du projet. Donc à partir du moment où il sort, il peut plus vraiment y avoir de mauvaises surprises.

C’est vrai qu’après avoir balancé « Parix-Bx » ou « Ca Va Bien Se Passer », « Le Bus » a pu en surprendre certains.

Je suis d’accord avec toi : c’est un risque. Mais de toute façon la musique c’est un risque. Donc à partir de là, faut pas hésiter, faut y aller, faut prendre certains risques.

C’est ça qui est cool. Tu n’as pas hésité à balancer des trucs kikckés et d’autres plus ouverts en singles.

Ah quand même on a hésité un peu ! Avant de prendre un risque, tu réfléchis toujours. Avec mon équipe on a réfléchi, on s’est demandé si il fallait vraiment l’envoyer. Et puis à force de réfléchir je me suis juste dit que si on balançait celui-là, qu’on prenait le plus gros risque, derrière on risquait moins de décevoir les gens.

Et au final le risque a été payant puisque le single a bien été reçu.

Oui voilà. Au final j’ai des bons retours dessus donc je suis grave content et ça me donne encore plus de confiance pour le projet.

Mon ressenti global sur le projet, c’est que tu développes vraiment un large univers. Et ça peut surement t’amener plus loin, dans le futur, dans ce que tu vas être capable de proposer.

C’est clair. Comme je te dis, j’ai envie d’aller à chaque fois plus loin. Surtout dans la forme, j’aime bien faire des trucs sur lesquels on m’attend pas. Quitte à surprendre.

Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour Intégral ?

Avec ce projet on cherche surtout l’acceptation du public, l’acceptation de mon univers musical. Mes attentes sont surtout situées à ce niveau. Et sur un premier projet, je pense que c’est ce qui est dans la tête de tout le monde. Après les chiffres, bien sur, c’est ce qui fait parler, ce que tout le monde regarde. Si y’a des bons chiffres, ça voudra forcément dire que le projet à été bien accueilli. Mais je regarde pas forcément combien de ventes je vais faire, mais surtout combien de personnes vont s’attacher à ce projet. Combien vont se dire « Ok, Nahir on le kiffe, c’est notre artiste favori ».

Dans le reste de l’actualité, SCH balance la tracklist de JVLIVS II.

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