Musique
Nos cinq coups de cœur du début de 2020
2020 ne sera sûrement pas la plus belle année pour le rap français, forcée par des conditions délicates, mais elle nous a offert de beaux projets ces six derniers mois. Voici une petite liste non exhaustive de nos albums préférés.
Népal avec Adios Bahamas
Avec cet album conçu et fini du vivant de l’artiste, Népal est resté fidèle à lui-même tout en prenant des risques, en sortant de sa zone de confort. Humilité, sobriété et sincérité se dégagent d’un ensemble éclectique et efficace. On salue le travail de son entourage qui a permis de conserver le fragment d’âme que l’artiste y avait enfoui, faisant de ce projet une œuvre à l’identité forte. Un mal être évident en ressort, mais aussi un message empli de la sagesse de celui qui s’en va et laisse le monde continuer à tourner après lui. Alors le temps d’un album, il nous invite à tout mettre en pause et sortir du système. A prendre le temps de vivre et de contempler ce qui nous entoure, la mer sans fin sur une plage aux Bahamas. Et ça fait du bien.
Voir aussi La version physique de “Adios Bahamas” de Népal disponible
Isha avec La Vie Augmente 3
Venant clôturer la trilogie de La Vie Augmente, il s’agit sans aucun doute du meilleur des trois opus. Dans cet album de 10 titres on retrouve des featurings aussi évidents (avec Dinos et son protégé Green Montana) que surprenants avec PLK sur Tradition. Désabusé et provocateur, Isha dresse ici une satyre de notre société et d’une génération de rappeurs « blingbling » dans laquelle il a du mal à se retrouver. D’une technicité toujours aussi redoutable, la plume du bruxellois s’est aiguisée depuis son dernier projet. Et on ne saurait oublier la magnifique leçon d’histoire qu’il nous livre sur Les Magiciens, un conte fantastique renfermant l’horrible tabou de la colonisation belge au Congo. Un album complet et criant d’authenticité.
Pour en savoir plus, voir Parlons de “Les magiciens”, le récit fantastique d’Isha
Laylow avec Trinity
Le jeune rappeur toulousain a tenté le tout pour le tout dans ce premier album en repoussant les limites du réel. Il ne s’est rien refusé et a poussé sa créativité au maximum en donnant vie à Trinity, inspiré du film Matrix. Cet album s’articule en trois actes. La première est la phase de lancement de Trinity, un logiciel de stimulation émotionnelle, puis son explosion avec le titre Burning Man en feat avec Lomepal et enfin sa disparition avec « Logiciel triste ». Laylow réussit à nous faire prendre part à une expérience unique et originale que chacun peut interpréter et vivre différemment. On se prend au jeux et on est ébloui par la virtuosité d’un artiste qui commence enfin à avoir le succès qu’il mérite.
Les dernières actualités de l’artiste avec Laylow collabore avec Cerrone pour l’inédit conceptuel “Experience”
Yuzmv avec YUZMV
Pour son premier album très identitaire auquel il a donné son nom, Yuzmv se livre tout entier à son public. Sur ce projet assez homogène on retrouve 16 titres aux allures de comptines modernes. On est ému par les histoires qu’il nous raconte avec ses tripes sur de magnifiques pianos voix. Il y livre ses émotions les plus noires et les plus profondes sans aucune pudeur. Les thèmes sont assez récurrents mais abordés avec une intensité peu commune en choisissant de consacrer une histoire entière par chanson. Avec YUZMV, le rappeur de Perpignan n’a pas eu peur de se mettre à nu et s’est paradoxalement rendu anonyme en bandant son visage sur cette pochette, évocatrice de la douleur douce dont il nous fait part tout au long de l’album.
Infinit’ avec Ma vie est un film 2
Des rimes riches et efficaces, un flow précis et d’une technicité peu commune, si ce n’est d’un autre temps. Voici un des rares artistes qui s’attache encore à respecter les codes originels du genre, refusant à tout prix de se conformer aux tendances. Cet album est un condensé d’influence west coast, de trap agressive et d’une bonne dose d’égo-trip, mais pas que. On fait face un Infinit’ mûri qui fait part d’un sensibilité nouvelle. En pleine introspection, il est conscient qu’il est « infiniment petit dans l’infiniment grand » dans le morceau de clôture Infiniment. Un véritable album de rap pour les puristes, qui s’avère aussi être une leçon de style pour l’ensemble du rap français . Pour l’accompagner dans ce deuxième volume, le mot d’ordre a été » on ne change pas un équipe qui gagne ». On retrouve donc Deen Burbigo, Gros Mo et surtout Alpha Wanna sur l’excellent Cigarette 2 Haine pour un duo infernal.
Pour plus de détails sur le projet, voir aussi Nos cinq morceaux préférés de “Ma vie est un film II” de Infinit’
Et pour finir, quelques mentions honorables
On a aussi tenu à saluer le très réussi Nouvo Mode de Sneazzy, l’ovni de Varnish La Piscine avec METRONOME POLE DANCE TWIST AMAZONE ainsi que celui des Twinsmatic, Atlas où l’on retrouve notamment SCH, Dinos, les 13 Block et Koba la D. Et enfin, la performance efficace de Bosh sur Synkinisi, loin de devoir être résume avec « Djomb ».