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Rencontre avec Ikaz Boi, le producteur à qui la France ne suffit plus

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Discussion avec Ikaz Boi, l’un des beatmakers les plus en vue du moment.

Alors qu’il se cache derrière les productions des plus grands rappeurs francophones (Damso, Jazzy Bazz, Joke, Hamza…), ce beatmaker issu de la Roche sur Yon est bien parti pour franchir les frontières Outre-Atlantique. Quelques jours après la sortie des deux singles de 13 Block, « Somme » et « Vide », le producteur Ikaz Boi a répondu à nos questions.

Tu crois qu’il y a combien de mecs de la Roche-Sur-Yon qui passent sur OVO Sound Radio ?

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Myth Syzer est passé en même temps que moi mais sinon, y’en a pas beaucoup. Mais c’est intéressant. C’est là que tu te rends compte qu’avec Internet tu peux finir sur un album ricain ou sur une radio comme OVO Sound Radio.

Comment t’as commencé, et à quel moment tu t’es rendu compte que t’allais vivre de ça ?

J’ai débuté à 14 ans en samplant sur un logiciel. J’ai commencé à contacter des rappeurs américains et j’ai réussi à poser des prods pour des membres de SAVE MONEY (Chance the Rapper, Vic Mensa) sans jamais les rencontrer, tout par internet. En France, j’ai commencé avec Joke et Veerus. Après, ça a mis du temps car mon style est assez particulier. Ca fait vraiment deux ans que j’en vis pleinement. Le son de Joke “On est sur les nerfs” a été un véritable tremplin dans ma carrière.

Tu peux nous parler de ta relation avec Myth Syzer avec qui tu as collaboré sur le projet Cerebral ?

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C’est une relation d’amitié avant tout, ce qui est rare et compliqué aujourd’hui dans la musique. Quand j’étais au collège, on avait des potes en commun, ils nous ont connecté. On avait les mêmes références (Dr Dre, J Dilla…), on a commencé à produire Joke au même moment, donc il y avait beaucoup d’entraide entre nous.

Tu retrouves des différences/similitudes entre le rap français et le rap américain ?

De mon point de vue, ce qui parle en premier c’est la musique. La manière de bosser est la même, je fais mes prods en amont et après je vois comment la sauce prend avec les rappeurs avec qui je bosse. Ils marchent au talent, au coup de coeur, mais les ricains ne se prennent pas la tête de savoir avec qui tu viens. Les codes bien sûr sont différents. Aux Etats-Unis, tu peux facilement amener à innover au niveau des feats, alors qu’en france c’est un peu plus cadré. Si tu veux faire un feat avec Katy Perry, ca sera pas super choquant, donc au niveau du business c’est un autre délire.

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… et les Belges dans tout ça ?

Les Belges sont plus ouverts, même les Suisses. Ils ne se prennent pas la tête à se dire “Mon son sonne ricain ou pas”, je trouve ça cool. Ce qui apporte le plus au rap francais, c’est le fait de s’ouvrir. Et les Belges rendent le truc un peu plus international. Aux Etats-Unis tout le monde me parle de Daft Punk parce que c’est un monument international, ça a rendu notre son unique et c’est pourquoi on doit tous travailler. Quand on entend ça, on est fier d’être français.

Toujours sur le parallèle US / francophone : On commence de plus en plus à voir les producteurs mis en avant aux Etats Unis, tu penses que ça bouge aussi en France ?

Ca bouge un peu plus, mais on doit vraiment être derrière. C’est pas encore dans la tête des gens. Moi je suis à la recherche d’un tag, donc si quelqu’un peut m’en envoyer un, c’est cool (rires). Après il y a des artistes comme Hamza qui font des efforts pour mettre en avant les producteurs en les citant dans ses textes. Moi je fais en sorte de mettre mon nom dans les crédits parce que c’est vraiment important pour notre reconnaissance.

En 2016, tu as signé chez Bromance Records, qu’est ce que ça t’a apporté artistiquement d’être entouré de gars comme Brodinski ou Club Cheval ?

Artistiquement, ça m’apporte une ouverture d’esprit. Voir des mec comme Brodinski m’a beaucoup inspiré parce qu’il travaille aussi bien avec des rappeurs qu’on peut dire « underground » de la scène d’Atlanta qu’avec des pointures de l’électronique, et il excelle dans ces deux domaines. Pour ce qui est de la place du Hip Hop dans le label, on a tous les mêmes influences, donc le mélange de genres se fait vraiment naturellement. Les mecs de Club Cheval sont aussi des fans de rap donc c’était vraiment du bonus de bosser avec des mecs aussi ouverts d’esprits.

T’es un grand fan de la scène canadienne, en particulier celle de Toronto. On t’a vu au côté de Derek Wise (membre de XO), tu as vécu là-bas?

Oui de ouf, j’y suis allé cinq fois. A la base j’y suis allé sur un coup de tête. En fait je venais d’arrêter de taffer en tant que commercial et j’avais mis de l’argent de coté. J’y suis allé sans aucun contact. Sur place, j’ai fait connaissance avec des gens puis je me suis retrouvé dans une soirée avec Derek Wise. Je le connaissais même pas, je lui ai fait écouter trois prods et le lendemain il a fait « Lay Low ». Je viens de voir aujourd’hui que le son a fait 1 million de vues, ça fait vraiment plaisir.

Quand je suis rentré en france, j’ai continué à lui envoyer des prods et un jour Wondagurl me contacte par twitter en me disant qu’elle a entendu mes prods et qu’elle validait de ouf. Je lui répond que je viens à Toronto en décembre alors que j’avais même pas pris mes billets (rires), on est devenu potes et aujourd’hui on fait toujours des collabs. C’est une fierté de travailler avec elle, parce qu’elle fait partie de mon top 3 des producteurs aujourd’hui. Elle est partout.

On sait que tu collabores en ce moment avec 13 BLOCK, pour lesquels tu as déjà produit « Somme » et « Vide », est-ce on peut espérer te voir à la production de tout l’album ?

Pour être honnête, c’est ce qui est prévu. Le projet est en cours. On s’est rencontré sur Twitter. On s’est posé au studio Grande Ville, on a fait « Somme » qui a été super bien reçu par les gens. Du coup on s’est de nouveau connectés et aujourd’hui on a 8-9 sons ensemble. C’est la première fois que j’ai envie de faire la direction artistique d’un projet. Je leur donne un peu de directives sur certains trucs, eux aussi sur les prods, c’est un vrai échange. C’est ouf parce que je suis arrivé avec mon truc à moi et j’ai pas eu besoin de m’adapter en mode « faut que je fasse de la trap ou le style 13 block » ce qui fait qu’aujourd’hui les sons comme “Somme” et “Vide” c’est moi et eux. Il y a une vraie alchimie entre nous.

On retrouve des sonorités très différentes dans tes sons, sombres et mélodieuses à la fois. D’où vient ton inspiration ?

Je suis un gars qui écoute de tout. Frank Ocean a retourné mon cerveau cette année, ça me touche énormément, surtout le son “Provider”. Je peux aussi écouter King Krule ou du Migos. Ca m’est déja arrivé de faire une note vocale en ayant une idée de prod. Mais ce qui m’inspire le plus, c’est les bandes-son ou documentaires. Par exemple, la BO d’Interstellar m’a inspiré des mois et des mois. Après c’est en composant que je trouve l’inspiration. Tout se fait à l’oreille.

Si tu devais collaborer sur un projet commun avec un rappeur francophone ?

13 Block.

Et américain ?

En top 3 : Drake, Migos, Frank Ocean. Drake pour le coté RNB, tu peux tout faire avec lui. Migos pour le côté trap que je kiffe, et Frank Ocean pour son côté mélodieux et très expérimental.

Ton projet solo comportera beaucoup de feat comme tu l’as annoncé sur twitter, c’est prévu pour quand et à quoi doit on s’attendre ?

C’est prévu pour début 2018. On peut s’attendre aux feats avec les artistes avec qui je travaille habituellement, que ce soit producteurs ou rappeurs, surtout un feat très inattendu. C’est mon premier gros projet, et j’en suis super fier, car il me représente totalement.

Propos recueillis par Raphael Derhy et Niels N-Aghel.

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