Kanye West : l’histoire houleuse et intime de « Ye », qui fête ses 4 ans

Ye, le 8ème album solo de Kanye West, fête ses 4 ans. Controversé, décortiqué, le projet est malgré tout le fruit d’un parcours sinueux.

Intime, mélodique, Ye n’est pas un album de plus dans la discographique de Kanye West. Il s’agit d’un projet à l’histoire tortueuse et douloureuse. Aujourd’hui, ce huitième disque solo fête ses 4 ans. L’occasion de revenir sur les évènements antérieurs à sa sortie, sa préparation et la nature troublante et personnelle du résultat.

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L’hospitalisation de Kanye West

Premier avril 2016. Kanye West dévoile The Life of Pablo, un projet complexe et abouti, singulier mais sous l’égide d’une authenticité familière. De ce septième album sera entrepris le Saint Pablo Tour, une tournée plutôt inoubliable. Le 2 octobre, Ye écourte sa performance après la séquestration et le braquage de sa femme de l’époque, Kim Kardashian. Après l’annulation de plusieurs dates, le rappeur continuera finalement à assurer sa tournée.

17 novembre. Kanye West se produit à San Jose, en Californie, et fait une déclaration qui sera source de nombreuses difficultés. «Si j’avais voté, j’aurais voté pour Trump.» Certains fans le huent et jettent des objets sur la scène. Le rappeur détourne l’attention en attaquant Jay Z ou encore Beyonce, puis s’en va. Finalement, après un concert houleux à Sacramento et en raison de nombreuses crises d’angoisse et d’un épuisement général, l’auteur de The Life of Pablo écourte sa tournée de plusieurs mois. Il est hospitalisé au Ronald Reagan UCLA Medical Center. C’est au sein de ces nombreuses controverses que Ye prendra racine, comme un débat ou une thérapie.

Kanye West : «Je veux pardonner, et arrêter d’haïr»

Pendant de longs mois, Kanye West reste discret vis-à-vis de la sphère médiatique. En mai 2017, la rumeur court selon laquelle il travaillerait sur son nouvel album dans un ranch du Wyoming. 1 mois plus tard, Ye annonce la sortie de celui-ci au 1er juin 2018. Plus tard, il publie une conversation entre lui-même et Wes Lang, un artiste américain. C’est là que le public découvre la couverture initiale de l’album, représentant le chirurgien plastique Jan Adams. Celui-ci avait pratiqué une liposuccion et une mammoplastie sur la mère de Kanye, Donda West, entraînant sa mort après des complications. «Je veux pardonner, et arrêter d’haïr» confie Kanye West. Un premier titre, empli d’espoir, pour son nouveau projet, est retenu : LOVE EVERYONE. Rapidement, deux singles sont dévoilés. « Ye vs. The World », en featuring avec T.I., et « Lift Yourself ».

Entretemps, déclare dans un entretien avec TMZ que l’esclavage n’est qu’un choix. Après une année au cours de laquelle il avait déjà été critiqué pour son soutien à Donald Trump, cette déclaration virale place Kanye West au centre d’une tempête médiatique et probablement de la plus grande polémique de sa carrière. Finalement, LOVE EVERYONE ne verra jamais le jour. En deux semaines, le rappeur produit une nouvelle création, comme réponse aux nombreuses critiques le concernant.

Le 1er juin, 2018, cet album alternatif issu des «Wyoming Sessions» sera finalement divulgué : Ye. La pochette est issue d’une photo prise par l’artiste des montagnes du Wyoming sur son iPhone, alors qu’il se rendait à sa listening party, quelques heures avant la sortie du projet. Une courte phrase affichée sur la cover confirme les dires au sujet de Kanye West. «Je déteste être bipolaire, c’est dingue.» Quant au titre, son surnom, le rappeur l’expliquera finalement lors d’une interview. «Je crois que ‘ye’ est le mot le plus utilisé dans la Bible, et dans la Bible, il signifie ‘vous’. Donc je suis vous, je suis nous, c’est nous.»

Un album intimiste et mélodieux

Ye, c’est le billet d’entrée vers l’état psychologique de Kanye West. Les premiers morceaux annoncent la couleur. « I Thought About Killing You » aborde ses pensées suicidaires, tandis que « Yikes » fait référence à ses troubles bipolaires comme à une «superpuissance». L’esprit dissocié, Kanye West chante « Ghost Town » comme une ode à sa cruelle liberté. Quelque part entre désespoir et profond sentiment d’invincibilité, l’artiste peint le rapport entre dépression et euphorie maniaque. Il prouve encore une fois son talent pour le choix et l’utilisation de samples. Sont perceptibles « Someday » de Shirley Ann Lee en intro, puis « Take Me For a Little While » des Royal Jesters.

Le featuring « Wouldn’t Leave » avec PARTYNEXTDOOR rend, quant à lui, hommage à la loyauté de Kim Kardashian face aux controverses – cocasse lorsque l’on porte un regard sur leur relation actuelle. Pour clore l’album, « Violent Crimes » se place comme tableau des craintes de Ye. Concernant notamment la paternité, le morceau est guidé par la mélodie de piano et les sonorités gospel du mix. Sur Ye, beaucoup d’artistes en prennent pour leur grade. Stormy Daniels, actrice pornographique qui, selon ses dires, aurait couché avec Donald Trump, ou encore Russels Simmons, accusé d’agressions sexuelles. Celui-ci avait notamment réagi à l’entretien de Kanye West avec TMZ, déclarant qu’il souffrait et qu’il voulait se faire remarquer.

Ye représente probablement un tournant dans la carrière de son auteur. D’égocentrique et mégalomane, Kanye West profite d’une nouvelle perception qu’il place entre les mains de son public. Celle d’un homme torturé, plein de failles, et qui sait décidément superbement le transmettre en musique.

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Écoutez Ye.