Suivez-nous

Interviews

Gambino La MG : «Aux Ulis, rapper c’est naturel»

Publié

le

A l’occasion de la sortie de sa première mixtape La Gambinerie, nous avons retrouvé Gambino La MG, pour discuter de cette sortie tant attendue.

Après une série de freestyle, un EP remarqué, une signature au sein de l’écurie Hall Access, Gambino La MG a su se remettre au galop pour nous présenter son nouveau projet, signe d’une réelle évolution dans la carrière du jeune rappeur des Ulis. Entre esthétique et ambition, nous avons fais la rencontre d’une des figure montante du rap français. A l’occasion de cet entretien nous avons pu découvrir l’univers de Gambino et son parcours, en nous intéressant à la scène drill française, ainsi qu’aux aspirations bien réelles du membre de La MG. Rencontre.

Tu as sorti ton projet précédent En attendant La Gambinerie en janvier 2021, comment avais-tu reçu les retours ?

70% du projet était déjà sorti, mais c’est le fait que je l’ai mis sur les plateformes de streaming sous un vrai format qui a fait que le public l’a encore mieux reçu. Les freestyles étaient à 200.000 streams avant la sortie du projet et sont passés à un million un peu après.

«Je suis là pour mettre les Ulis en haut, parce que, pendant un long moment, on était en bas»

Pour retracer un peu ton parcours tu as commencé en groupe avec La MG puis, à partir de 2020, tu as posté des freestyles en solo sur ton Instagram. Comment s’est fait ce choix du solo ?

En réalité, j’ai commencé le rap en solo, le groupe s’est créé en cours de route. On est des mecs de la même ville, on est des frères avant d’être un groupe. Le solo, on pouvait le faire quand on voulait. J’étais parti une première fois en solo en 2018 avec des freestyles sur Daymolition qui ont bien marché et en 2019 on a pété avec La MG. Mais le buzz a baissé un peu après. Pendant le Covid-19, j’écrivais des freestyles dans ma chambre et ça m’a conduit à les poster sur Instagram.

Comment tu as commencé le rap ?

Il y avait un studio dans une maison pour tous qui existe toujours aujourd’hui, avec quelqu’un pour nous conseillait, un ingé son et tout ce qu’il fallait.

Il doit y avoir pas mal de rappeurs alors aux Ulis.

Aux Ulis, rapper c’est naturel, même sans vouloir percer.

Il y a des grands noms du rap français qui viennent des Ulis comme Diam’s, Sinik et Grodash. Ce sont des profils qui t’ont inspiré ?

J’ai pas écouté tout le monde, j’ai plus écouté Sinik et Grodash.

Ton groupe est quand même présent sur tes projets, notamment sur La Gambinerie, c’est important pour toi mettre en lumière les rappeurs de chez toi ?

Quand tu as la chance de venir d’une ville qui a déjà un nom dans la musique, tu te dois représenter. Ceux qui étaient là avant toi l’ont fait alors pourquoi je ne le ferais pas ? Je suis là pour mettre les Ulis en haut, parce que, pendant un long moment, on était en bas. Quand il y avait Sinik et Diam’s on était parmi les numéro 1 dans le rap et on a coulé plus tard, quand il y a eu d’autres grosses têtes du 91 comme PNL ou Niska qui ont percé.

Il y a quelques années on a pu voir un réel engouement autours des rappeurs du 91 mais dans une autre de tes interviews tu disais que les rappeurs des Ulis n’ont pas pu profiter de cette exposition. Aujourd’hui, est-ce que tu vois ta nouvelle notoriété comme une revanche sur cette époque ?

On a pas du tout profité de cet engouement, on n’était pas avec le 91, ça concernait plus Evry, Grigny, Corbeil. Pour eux on n’était pas dans le lot, on n’était trop loin, comme si le rap aux Ulis c’était un mythe. C’est pas vraiment une revanche, aujourd’hui les gens savent ce qu’on vaut, je cherche juste à mettre la lumière, j’ai pas besoin de prouver. En mettant de la lumière sur la ville, ça donnera de l’exposition à d’autres artistes, je bosse tous les jours avec mes gars sur la stratégie pour ma carrière et la leur.

Sans le vouloir, le succès d’autres personnes de ma ville aura aussi un impact sur moi, ils seront toujours reconnaissants. Par exemple, mon cousin Kirby, à force de le montrer sur mes réseaux, il a plus de vues que moi sur Snapchat. Le but c’est de ne pas être le seul à rayonner, comme ça je peux me concentrer exclusivement sur ma musique, mon entourage le fera pour moi via leurs réseaux, si les gens veulent me voir ils devront ajouter mon entourage.

«Tout ce que j’écoute je vais le retranscrire dans mes textes»

Certains rappeurs auraient plutôt tendance à restreindre leur entourage.

Aux Ulis c’est différent, ça concerne toute la ville, il y a pas de secteurs délimités, tout le monde est dans ton équipe, on n’a pas de problème entre nous. Moi j’ai pas de voiture, je fais le tour de la ville à pied. Je peux pas dire du jour au lendemain que je vais juste rester avec mon crew.

On peut considérer qu’une page s’est tournée depuis En Attendant La Gambinerie, en termes de visuel et de musique, tu as été un peu moins présent en envoyer des morceaux clippés plus travaillés.

La période après la signature c’est cette après laquelle j’étais le plus perdu. Je ne savais pas quoi faire. J’avais fait une série de freestyle qui avait bien marché, je savais plus vers quoi me rediriger. J’ai préféré faire des feats, comme celui avec Kepler qui est le premier d’entre eux. C’est des sons qui ont fait du bruit dans les cités, mais qui n’ont pas généré de streams. Jusqu’en juin 2021, j’ai rien sorti avec Sony en solo, mais ça m’a permis de mieux réfléchir aux sons que j’allais sortir pour le projet, c’est d’ailleurs dans cette période que j’ai fait la plupart des sons pour La Gambinerie. Et à partir de « C’est nous », ça n’était que du peaufinage.  En octobre, le projet était prêt.

D’ailleurs, peux-tu nous expliquer ta relation avec Negrito avec qui tu as déjà featé à deux reprises ?

On se connaissait avant la musique, on s’est donné de la force quand on était tous les deux sur Daymolition, même quand l’un avait plus ou moins de buzz que l’autre. Je l’ai invité dans mon « Freestyle 5 » pour figurer seulement, et à partir de là, les gens ont demandé le feat. Mais j’aurais préféré le sortir plus tard : on l’a sorti parce que c’était le seul avec qui je pouvais feater à ce moment. Si on avait sorti notre feat aujourd’hui, il aurait sûrement mieux marché. Maintenant, je garde des feats comme MIG, je préfère sortir ce genre de collaboration quand on aura une vraie force tous les deux, alors qu’on aurait pu le faire depuis longtemps.

On retrouve également Tiakola sur ton projet.

Tiakola je le connais depuis 2019, on devait faire ce feat depuis grave longtemps. J’aurais encore préféré attendre avant de le sortir, j’aurais même aimé le mettre dans Gambinerie 2 carrément. Dans le premier, j’aurais préféré mettre des rappeurs comme Naza et Niska, pour revenir avec le deuxième où j’aurais mis des feats plus orientés vers la nouvelle génération. Je trouve que les sons qui marchent le mieux sont ceux avec les rappeurs qui ont la même exposition que toi.

Aujourd’hui tu poses majoritairement sur de la drill, tu es même un fier représentant de cette mouvance. Qu’est ce qui t’as poussé à te lancer dans ce genre de rap ?

J’écoute de la drill depuis 2017. Tout ce que j’écoute je vais le retranscrire dans mes textes, parfois j’évite d’écouter trop de français, pour pas que ça se ressente dans ma musique, c’est ce que je faisais par exemple pendant la période où j’étais perdu. Aujourd’hui, j’ai ma propre ligne directrice, je me copie moi-même.

«La suite, ça sera pareil, en mieux»

On t’a d’ailleurs vu clipper l’un de tes morceaux à Londres, tu peux nous expliquer comment tu as organisé ça ?

Je l’ai fait pour montrer que je n’ai pas simplement suivi la hype pour m’engager dans ce mouvement. Comme je t’ai dit, j’étais déjà branché sur la drill depuis longtemps et si je ne l’ai pas fait plus tôt, c’est parce que je la maitrisais pas totalement avant.

Il faut remarquer tu utilises la drill avec une manière qui t’est propre, tes morceaux sont souvent ambiançant à travers ta manière de poser et le choix de tes prods. Est-ce une manière pour toi de te différencier des autres rappeurs de la scène drill ?

Mon problème, c’est que je me suis diversifié trop tôt, j’ai trop alterné entre kickage, chant et ambiance, alors qu’il y a des rappeurs qui ont le même buzz que moi, sans se diversifier, en gardant la même ligne directrice depuis le début. Par exemple, « Bédo » je l’ai fait alors que je n’étais pas encore connu et les gens m’ont découvert avec ça, alors que le public aurait dû me découvrir avec les sons kickés.

On te retrouve également avec Naza sur « Bébé », ça m’a directement fait penser à « Bédo » présent sur En attendant La Gambinerie.

J’aimerais en faire un par an de son afro-drill. À l’époque où j’ai fait « Bédo », c’était mon seul son dans ce délire, mais quand j’allais en rendez-vous avec des labels, on ne me parlait que de ce son, ils ne me voyaient déjà que dans ce créneau. C’est pour ça que j’ai signé avec Mouss Parash, c’est le seul qui ne m’en a pas parlé. Pendant les négociations, c’est le seul qui essayait pas de me vendre du rêve, on partageait les mêmes valeurs, il m’a juste dit qu’on allait travailler.

D’ailleurs ton style pourrait se rapprocher à travers tes gimmicks de rappeurs anglais comme M24, ou aussi via ton énergie qui peut se rapprocher d’autre drilleurs comme Russ Millions ou Ambush. Tu te verrais collaborer avec des artistes anglais ?

À la base, quand je suis allé clipper en Angleterre c’était pour rencontrer des rappeurs anglais, mais j’aimerais bien feater avec des Anglais.

Pour revenir aux morceaux présents sur ton projet, on peut remarquer des morceaux comme « À tout moment » ou « Dehors », sur lesquels tu te livres sur ton histoire, ce que tu ne faisais pas avant. Qu’est ce qui t’a poussé à franchir ce pas ?

Avec La MG on faisait déjà des sons dans ce registre, même si on se livrait pas autant, le fait de chanter dans mes sons ça m’a jamais dérangé. Mais c’est au feeling, quand je suis au studio je prévois ce dont je vais parler, c’est en fonction de ce que ça m’inspire.

Il y a un autre morceau qui sort du lot dans ton projet, c’est « Full Up », peux-tu nous expliquer comment tu as fait ce morceau étonnant ?

C’est le beatmaker qui m’a sorti cette prod, je dis des trucs de ouf dedans, comme avec le Double Hook quand j’ai dit « Toute la stup’ est dans mon cul ». Au début, ça m’a mis dans la sauce, mais après le son a marché. Si t’es un mec droit, ce n’est pas risqué, j’ai toujours été carré, même si tu me clashes sur Twitter, ça ne me fait rien.

Avec toutes ces prises de risques sur tes projets, à quoi peut-on s’attendre pour la suite en termes de sonorité ?

Je vais continuer à me diversifier, je veux rester sur de la drill en tentant de nouvelles ambiances à chaque fois. La suite ça sera pareil en mieux, j’aimerais bien essayé la drill sur du jazz ou du blues. Dans La Gambinerie 2 j’ai samplé du zouk par exemple.

Quant à nous que peut-on te souhaiter pour la suite ?

Souhaitez moi bonne chance.

Commentaires

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *