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Prinzly : «Ce projet marque le début du reste de ma carrière»

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Pour Prinzly, 2023 marque la fin d’un cycle et le début d’un nouveau. Son tout premier projet, Passager 8, vient de sortir.

Enfin, nous y sommes. Des jours que nous voyageons à bord d’un vaisseau froid et métallique à des années-lumière de la Terre. Des heures que nous tentons de retrouver la trace de cet individu cosmique, vêtu d’une veste chromée et d’une paire de lunettes noires. Mais nous l’avons retrouvé, il est là. Ce cosmonaute belge, ce musicien de l’espace, ce collaborateur de génie. Ce passionné des ondes : Prinzly. Sur cet astre lointain, on a longuement conversé : son rapport à la musique, ses tendances cinéphiles, ses ambiances galactiques, il n’a rien dissimulé. Il a ainsi présenté sa propre capsule temporelle, inspirée du monde de l’inconnu : Passager 8. Décollage imminent.

Prinzly, dans quel état d’esprit es-tu à l’aube de la sortie de ce tout premier projet ? 

Je suis épuisé, mais je suis très très positif.

Tu es lancé dans une boucle infernale, ça y est ?

Oui, ça n’arrête pas. Et je pense que ça ne va plus s’arrêter jusqu’à ce que je sorte le projet, je me suis fait une raison !

Justement, tu as fait pas mal de promo autour de ce projet, notamment à travers le groupe de discussion que tu as lancé sur Discord. On y trouvait différents jeux de pistes, des indices sur le projet, des quêtes à réaliser… De même pour tes clips, où tu as dissimulé un Caméo de Disiz pour annoncer ton feat avec. Tu as aimé l’exercice ?

J’ai adoré ! En plus, ça permet d’interagir avec les gens, de voir comment ils réagissent, ce qu’ils kiffent. Ça me donne un autre rapport avec ceux qui supportent ma musique et je comprends mieux qui sont mes auditeurs. C’est important de s’y intéresser parce qu’en vrai, nous les artistes, on a besoin d’eux, on a besoin du public. Sans ça, on ne vit pas. 

Et si on se focalise sur Passager 8, le titre de ton projet, je me trompe si je dis que c’est en lien avec le film Alien, le huitième passager

Bien joué ! C’est la première fois qu’on ne me pose pas la question “d’où ça vient ?”. 

Et ce n’est d’ailleurs pas la seule référence cinématographique dans ton projet. On a aussi une petite mention pour le film 2001, l’Odyssée de l’espace dans le morceau Propulsion. Ce sont des films importants pour toi ? 

C’est totalement inspiré de l’Odyssée de l’espace ! On entend effectivement une voix qui parle de “HAL Système 12”, une intelligence artificielle qui guide un vaisseau. Mon vaisseau. Et comme tu le dis, c’est inspiré de HAL 9000 dans le film. J’ai des parents qui sont très cinéphiles, en particulier ma mère qui regarde de tout.

Et les films que tu viens de citer font partie de ceux que j’ai découverts avec mes parents quand j’étais jeune, sauf Alien ! Alien, normalement, je n’avais pas le droit de le regarder, j’étais trop petit. Donc j’ai un peu triché quand j’étais avec mes grands cousins. Bon, ça m’a traumatisé sur le moment, mais ça m’avait quand même fortement marqué, tout cet univers.

Les films occupent une place majeure dans ta vie, dans cet album au niveau des références que tu cites, mais également dans la construction de ta tracklist. Chaque morceau possède une place bien définie et le tout se déroule en plusieurs actes. Comme la trame d’un film, finalement ?  

Exactement. Je voulais qu’on ait la sensation d’effectuer un aller-retour dans l’espace, un voyage cosmique. Et vu que je suis un grand fan de films de science-fiction, je voulais retranscrire ce qui, selon moi, ressort de ces films : une ambiance spéciale, des musiques qui te transcendent, des sons bien particuliers. En plus, j’ai aimé créer une ligne directrice qui peut te prendre à contre-pied. C’est-à-dire que, quand tu écoutes Propulsion, le premier son de la tracklist, tu penses que tu décolles de la Terre pour aller dans l’espace. Sauf qu’en fait, quand tu arrives au dernier morceau du projet, Terra, tu te rends compte que j’étais déjà dans l’espace et que je décide de retourner sur Terre.

@jonagraphe

Et depuis quand tu possèdes cette espèce de fascination pour le chiffre 8 ? Chiffre qui gravite autour de ton album et de ton personnage.

Le 8, c’est mon chiffre favori, c’est lié à ma date de naissance, et puis le frérot l’a très bien dit, quand tu tournes le 8 à l’horizontale, ça fait l’infini. Et l’infini c’est sans limite, c’est toujours découvrir, toujours explorer. Mais de base ça part du fait que, quand j’ai voulu faire mon compte Instagram, “prinzly” était déjà pris et je n’avais pas envie de prendre un nom un peu bateau, donc « prinzly888 » ça tombait sous le sens. À l’origine, c’est surtout un accident, rien n’était réfléchi et, au fil du temps, je me suis approprié ce chiffre et tout ce qu’il signifie. 

Tu sais qu’il y a plein de significations pour la suite 888. J’en ai trouvé une qui colle plutôt bien avec ton projet, et ta carrière en général, : “le chiffre 888 vous avertit qu’une étape de votre vie touche à sa fin et qu’une autre débute”. Ça te parle ? 

De ouf ! Ça va très bien avec ma manière de penser et ce à quoi j’aspire. Je viens de terminer un cycle : j’ai bossé sur QALF avec Dems, sur l’Amour avec Disiz… Tous ces projets m’ont permis de clôturer cette carrière de compo, et strictement de compo. Ce projet marque le début du reste de ma carrière. 

Une nouvelle boucle est lancée, pourtant, dans cet album, on dirait qu’une partie de toi reste dans le passé. Il y a un côté nostalgique très assumé, avec beaucoup sons de synthés, des parties disco-funk et surtout, de nombreuses références à la pop culture des années 80/90.

T’as tout compris. J’ai toujours eu un aspect très nostalgique dans ma musique, tout en étant un peu turfu. Je dirais même que mon style à moi, c’est un style de musique “rétro futur », c’est pour ça que j’aime autant les Daft Punk.

Et justement, ton titre Chrome Surfer est une référence au comics de Jack Kirby, le Surfeur d’Argent. C’est un héros de ton enfance ? 

Oui, c’est un personnage qui m’a toujours fasciné. Pour la petite histoire, c’est quelqu’un qui vient d’une planète qui était en train de mourir et, pour sauver sa planète, il a dû faire “un pacte avec le diable”, qui dans le récit se trouve être Galactus. J’adore l’histoire et j’aimais surtout le fait qu’il voyage à travers le temps, dans le cosmos, sur une planche de surf avec une tenue complètement argentée.

Et on pourrait savoir à qui appartient la voix féminine qui chante sur le morceau ? 

Alors, celle qui chante, c’est une très très bonne amie à moi, qui est aussi artiste. Elle s’appelle AURAA THE KIDDO. D’ailleurs, elle fait une petite apparition sur l’album de Laylow, L’Étrange Histoire de Mr.Anderson. C’est elle qui dit “Yo Lay, what the fuck is going on here ?” sur WINDOW SHOPPER PART.2. Donc c’est cette même personne qui chante sur ce titre et je bosse avec elle depuis 4 ou 5 ans. C’est quelqu’un que j’aime beaucoup, alors je voulais la mettre en avant d’une certaine façon. 

Et sur le titre “Le Monde”, c’est ta fille qu’on entend dire “zoum” à la fin du morceau ? Elle a une place importante sur ce projet ? 

C’est bien ma fille ! D’ailleurs, dans GAMMA, on peut la voir dans le clip. Un projet, pour moi, c’est aussi comme une capsule temporelle : tout ce que tu es en train de vivre à ce moment précis de ta vie, ça reste enfermé là-dedans pour toujours. Donc oui, j’ai eu envie de partager ça avec mes proches. Tu vois, le jour où ma fille sera une femme, avec des enfants qui sait, moi, je ne serai peut-être plus là et je me dis qu’elle aura ce projet comme souvenir. Ce moment partagé, c’est quelque chose qu’on aura toujours en commun, elle et moi.

GAMMA – Prinzly on YouTube

Passager 8 est ton tout premier projet en tant qu’artiste au sens large du terme, et non en tant que producteur compositeur. Penses-tu que ta vision artistique a évolué en endossant ce nouveau rôle ? 

J’ai envie de dire oui et non. J’ai toujours rappé et ça fait longtemps que je veux faire mon projet. C’est juste que j’ai toujours eu certaines exigences, et, avant d’avoir les moyens de sortir un beau clip, de faire de la promo comme il faut, il fallait que je bosse. Tant que je n’avais pas ces moyens-là, je ne voulais rien sortir. Donc comme Ponko m’a déjà dit, pour lui, j’ai le niveau d’un mec qui a sorti 3 albums, mais ça, c’est parce que j’ai fait des albums qui ne sont jamais sortis… (rires).

Mais j’aimerai quand même dire qu’avoir bossé avec autant d’artistes, que ce soit chanteur, rappeur ou autre, ça a été très formateur. Entre le moment où j’ai arrêté de rapper jusqu’à aujourd’hui, les manières de travailler dans la musique ont énormément évolué. À l’époque, on ne se retrouvait pas en studio à plusieurs pour faire des prods tous ensembles, à chercher des flows, etc. Avant, tu devais arriver avec ta prod au studio, tu poses tes couplets et puis tu dégages.

C‘est vrai qu’aujourd’hui, le processus de création d’un album laisse plus de place à la liberté, à la créativité et à l’expérimentation.

Totalement. C’est de ce processus que j’ai pu profiter en bossant avec des artistes que j’apprécie énormément.

Et le fait de passer de l’ombre à la lumière te fait-il découvrir de nouveaux aspects de l’industrie ? 

Je pense que oui. Avant, je devais juste me soucier de la musique, à ce qu’elle soit la meilleure possible. Maintenant, je me rends compte de tout ce que les frérots font depuis des années. Parfois, je repense à des conversations que j’ai pu avoir avec certains d’entre eux, comme Hamza ou Laylow par exemple, me disant qu’ils étaient fatigués par les interviews et les tournées. Et c’est vrai qu’à présent, je comprends mieux ce qu’ils vivaient à ce moment-là. Il y a encore toute une facette de l’industrie que je ne connaissais pas jusqu’à aujourd’hui.

Quatre feats sur Passager 8 : certains semblent évidents comme celui avec Disiz, ou encore celui avec Hamza, et d’autres sont plus surprenants. Comment s’est fait ton choix ? 

Et bien pour te dire toute la vérité, à la base, je ne devais faire aucun feat. Tous les feats que j’ai fait sur Passager 8 se sont proposés ! (rires). Hamza, par exemple, lui il est arrivé au studio, il a entendu un morceau sur lequel je bossais – et qui, d’ailleurs, n’est même pas sur le projet – , et il a tellement kiffé qu’il m’a demandé de le remettre une fois, deux fois, trois fois… Et là, il me dit “mais gros, depuis le temps qu’on se parle de faire un feat, t’es chaud on en fait un maintenant ?”. Voilà comment ça s’est lancé.

D’ailleurs, on ne parle pas d’un feat avec Hamza, mais de deux !

Finalement, on en a fait un deuxième oui ! Ça s’est fait hyper naturellement, c’est ça que je trouve génial. De même pour Disiz, Tiakola et Laylow. D’ailleurs, lorsque Lay a appris que je préparais un projet solo, c’était pendant la session de “R9R-LINE”. On taffait le son avec Damso, et il s’est proposé comme ça, très spontanément.

@jonagraphe

Tu parles du feat avec Laylow : pourquoi le mettre sur un interlude ? 

Parce que je suis relou. Et puis aussi parce que Laylow et moi étions d’accord : on ne voulait pas faire un feat classique. Tu sais, à ce moment-là, il était sur un run où il avait fait pas mal de feats, donc refaire une énième collaboration avec un couplet – refrain – couplet, ce n’était pas ce qu’on voulait proposer. Même en ce qui me concerne, dans la conception du projet, je trouve que Laylow sur un interlude, ça amène plus de sens, ça colle à l’univers que je veux proposer.

C’est une super idée, ça donne une autre dimension à sa proposition artistique, à la tienne également. Mais avouons-le, avoir seulement 1m30 de Laylow sur un projet qui fait parfaitement le pont entre vos deux univers, ça peut être frustrant.

Alors écoute, c’est totalement voulu ! (Rires). Je ne vais pas te mentir, ce qui m’a poussé à faire ça, c’est peut-être Donda de Kanye. Quand tu écoutes l’album, tu tombes sur l’interlude avec Don Toliver : Moon. Et elle me rend ouf parce que j’en veux beaucoup plus ! Mais aussi c’est ça qui rend le son génial. Donc je me suis dit « il me faut un interlude où je ne suis pas dessus, juste Laylow, et où à mon tour, je rends les gens ouf ».

Et c’est mission réussie. Chacun des artistes qui collaborent sur ton projet possèdent une empreinte artistique assez forte : comment tu parviens à trouver de la cohérence et de l’équilibre entre l’univers que tu veux proposer, et celui de Tiakola par exemple ? 

Premièrement, le fait d’avoir déjà bossé avec Hamza, Disiz, Laylow et Tiakola me rassurait beaucoup, dans le sens où je savais comment ils travaillaient, et je savais qu’ils étaient parfaitement capables de sortir de leur zone de confort. Et deuxièmement, c’est vrai que voir Tiakola sur le projet peut surprendre, mais c’est ce que j’aime le plus ! Un jour, j’étais avec un pote en studio et je lui ai dit que j’allais faire une session avec Tiakola pour mon projet. Il m’a directement dit « mais pour quoi faire ? ». Pour lui, c’était improbable. Et quand il a écouté le morceau, il m’a dit “mec, putain c’est une dinguerie, il fallait y penser”. 

Tu as eu la vision.

Pour le coup, c’est vrai que moi, à l’inverse, je me suis toujours dit que ça lui irait trop bien d’aller sur des sons comme ça. Donc franchement, ça me fait trop plaisir qu’il expérimente de cette manière sur mon propre projet ! En plus, c’est vraiment quelqu’un qui, humainement, est génial. Je le considère un peu comme un petit frère. C’est un gars très respectueux et j’admire beaucoup ça.

Passager 8, c’est un 17 titres avec beaucoup de matière. Les textures et les ambiances sont particulières. Pour toi, quelles sont les meilleures conditions pour l’écouter ? 

Je crois que c’est un album à écouter dans un casque. Vu les détails qu’il y a dedans, si tu l’écoutes en soirée par exemple, tu ne vas jamais capter toutes les subtilités, c’est impossible. Donc selon moi, le meilleur moyen d’écouter Passager 8, c’est le casque, et ensuite c’est la voiture. J’ai fait le test de conduire la nuit, vers 22h/23h, le son à fond, grosses basses, et franchement ça passe hyper bien aussi ! 

Comment s’annonce la suite de ton voyage ? 

La suite de mon voyage, c’est l’album. Parce que Passager 8, pour moi, ce n’est pas “l’album”, je l’appelle plutôt “le projet”. Je suis déjà dessus parce que je n’ai pas envie de m’arrêter sur ma lancée. Là, je suis dans un mindset où je me dis qu’il faut que je m’installe.

Tu as cette pression-là ? De ne pas trouver ta place ? 

Non ce n’est pas forcément ça. C’est juste que j’ai envie de sortir de la musique le plus possible ! Dès que je boucle un son que je kiffe, j’ai envie d’avoir la liberté de me dire “let’s go, on le sort”. Je veux vraiment en arriver là. Donc la suite, c’est de bosser sur mon album, et en attendant que ça sorte, peut être sortir des sons par-ci par-là ! La suite, c’est charbon. On ne s’arrête pas.

 

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