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Cashmire : «J’ai toujours voulu symboliser une espèce de liberté»

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Cette semaine on a retrouvé la nouvelle étoile du 18ème arrondissement de Paris : Cashmire, à l’occasion de la sortie de son premier album, 018.

Niché entre Marx Dormoy et La Chapelle, Cashmire nous a ouvert les portes de son univers : le 18ème. À la manière d’un Oxmo Puccino ou d’un Doc Gynéco, dont il reconnaît volontiers l’influence, Cash’ décrit son quartier qu’il aime temps d’une manière bien singulière. Sans écarter ses cotés sombres, il ne peut occulter son amour pour le lieu qui a inspiré le nom de son album : 018. Au beau milieu de sa maison à ciel ouvert, Cashmire nous a confié son approche au rap et ses ambitions. Mais il nous a surtout permis de comprendre comment s’est construit l’identité du Cashmire.

Alors Cashmire pour commencer est ce que tu peux nous expliquer où on est ?

On est dans le 18e, dans le quartier où j’ai commencé le rap, on est plus précisément à L’Esplanade. Il y a un gymnase où ça joue au foot. On est à Max Do’ !

Si tu devais me décrire cet endroit en trois mots tu dirais quoi ?

En trois chiffres plutôt : 0.1.8.

Qu’est ce qui rend ton 18e si différent des autres quartiers selon toi ?

Déjà, on est dans Paris, mais on est banni. C’est comme une banlieue dans Paris. En trois mots ce serait : « No Go Zone ».

Comment ton quartier t’inspire et qu’est-ce qu’il t’a appris ?

C’est une part de mon identité, je représente le 018, c’est une manière de penser, des principes, des valeurs, un état d’esprit.

«Quand tu quittes le bendo, à la fin, tu reviens toujours»

Avec Roms, un autre rappeur du 75, on avait parlé de la violence mentale que peut imposer la vie à Paris.

La vie est violente et on normalise ses aspects les plus violents. T’es obligé de te blinder pour ne pas être vulnérable, tu ne peux pas te montrer vulnérable face à cette vie. T’as 8 ans, tu vas au stade pour jouer au foot, tu vois des seringues, des prostitués : tu es confronté directement à des choses très violentes. Dans le ghetto il y a un truc où t’es enclavé, si tu as la chance de pouvoir sortir, tu pourras voir d’autres choses, mais tu te confrontes à une nouvelle réalité qui est violente. Un nouveau cadre de vie, d’autres habitudes. Quand tu quittes le bendo, à la fin, tu reviens toujours. Moi j’ai eu la chance de voir autre chose, mais je suis pas un super-héros, j’ai des amis qui n’ont pas eu cette chance, qui m’ont dit : « J’aurais kiffé aller à l’école ». Et on est à Paris, ça fait mal au cœur.

Est-ce que maintenant tu voudrais avoir un rôle social dans ton quartier ?

Ça se fait naturellement, j’ai toujours voulu symboliser une espèce de liberté, montrer qu’il n’y a pas de limite, ni de honte ou de conditionnement. J’ai toujours voulu influencer positivement, c’est réellement ce que je tends à faire. J’aimerais que ça prenne des aspects plus sérieux, un artiste peut aussi avoir un impact social.

«On peut être un équivalent d’Atlanta»

On ressent souvent dans tes sons que tu veux garder message. Même sur des prods électro comme dans  « Bienvenue » tu détournes l’attention du public sans perdre ton propos.

Moi, ce qui m’importe c’est de rapper des choses vraies et de rapper comme personne. Je veux avoir mon son à moi, un son 018.

Ces derniers temps on ressent de plus en plus que le 18ème est un vrai vivier de rappeurs, avec balafré, Rapi Sati ou encore le succès de Guy2bezbar, comment tu vis ce nouvel engouement autour du 18 ?

Ça fait plaisir de fou ! On se connaît avec ces gens-là, depuis qu’on est petit on est ensemble. Je me suis toujours dit qu’on est une scène de fou, même quand le quartier il était dans blizzard. On peut être un équivalent d’Atlanta. J’ai toujours été fâché avec le fait qu’on n’est pas représenté aujourd’hui dans le rap parisien.

CASHMIR

On sait que tu fais partie d’un collectif d’artistes, RChaos, est ce que tu peux nous en parler ?

C’est la famille, je suis un membre pilier du collectif. On avait 17/18 ans, on s’est retrouvé entre créatifs dans la ville. Il y a des photographes, des peintres, des musiciens, c’est mon crew. On est une famille artistique. Je suis le seul rappeur de RChaos, mais ça m’a donné une vision et la définition du mot « artiste ». Comme : celui qui en définissant l’univers artistiquement, définit son art et se définit en même temps.

L’idée d’un collectif multidisciplinaire m’évoque directement la A$APMOB, est-ce que c’est un modèle qui t’inspire 

On a un coté mob, dans pas mal de mes taffs, mes visuels sont fait par un membre du RChaos. On est une vraie équipe créative.

Quel est ton premier rapport au rap ?

C’est grâce à mon cousin que j’ai découvert le rap. Eminem, Jay-Z, Nas, 50 Cent, il m’a fait passé de Mat Pokora à Justin Timberlake ! J’ai commencé à m’intéresser à cette culture et j’avais même fait un remix de « Garde la Pêche ». C’était nul à mort et je me suis rendu compte que c’était dur le rap.

La première fois que tu rentres en studio c’est pour « Tam Tam », qu’est ce qui a changé dans ton processus créatif depuis cette époque ?

Je me suis professionnalisé, j’ai de nouveaux reflexes en studio, ça va beaucoup plus vite en studio, je connais ma voix et mes points forts, je travaille mes points faibles. Tout a changé en réalité, avant je devais payer toutes mes séances studio, il fallait écrire précisément tous mes couplets avant d’aller au studio. Aujourd’hui, je suis dans un truc beaucoup plus naturel : je prends le temps, j’écoute les prods sur place et je créé sur place.

Toi tu parles de « New Pop Rock », d’autres artistes de ta génération parlent de « New Wave » (La Fève, J9, Khali, Sonbest). On ressent un vrai renouveau dans le rap avec des artistes qui osent et prennent beaucoup plus de risques, à la croisée entre plusieurs genres musicaux. Avec quel œil vois-tu ces cette nouvelle scène ?

Ce sont mes potes, on est connecté. « New Pop Rock », c’était la façon dont je présentais mes sons dans Poeticghettosound, c’est plus un terme que j’utiliserais. La scène « New Wave » ça me fait plaisir, faut qu’on retourne tout, ça pousse à se surpasser. Je sais que je suis dans cette scène, mais je suis tellement focus, que j’ai du mal à le réaliser, mais je vois bien qu’il y a un mouvement de groupe, on se donne de la force, il y a même des liens avec des gars comme Malo.

Tu es déjà rentré en studio avec des artistes de cette scène ?

On se croise et on s’est souvent retrouvé dans des endroits ensemble, on a un tas d’amis en commun. Si ça doit déboucher sur du studio, ça se fera naturellement et je dis ça sans exclusion. De toute façon on est connecté dans la ville, les choses se feront naturellement.

Quel a été ton objectif avec ce nouveau projet ?

Je voulais apporter un regard sur mon quartier, là où, dans mon premier projet, j’étais plus centré sur moi. C’est un projet sur mon environnement, sur ce qui m’entoure et, au final, ça reste un projet sur ma vie et mon mode de vie. T’es vraiment en immersion dans le 018. Je fais en sorte de tourner tout ça positivement, de le mettre dans un joli papier cadeau. Je prends un point de vue omniscient, je fais pas le bandit, ni le rigolo, je raconte ma réalité, ce que je vois, ce que je vis. Au lieu de te parler de « kilos et de litrons », je vais te parler de mon reuf en prison à cause de ça, parce qu’il me manque. Je ne fais pas de glorification de la rue et je la romance pas non plus, je raconte ce que je ressens.

Comment tu te positionnes par rapport à la scène rap ?

Moi c’est CASH MONEY BABE, moi je veux prendre mes sous, moi j’ai pas de complexes, les gens se chargeront de savoir comment ils me positionnent et comment ils me voient, ça ce n’est pas mes histoires.

Qu’est ce qu’on peut te souhaiter pour cet album ?

Que le 018 en soit fier.

Dans la suite de l’actualité : Il faut qu’on parle du retour très, très méchant de Niska

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