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Roms : «J’ai toujours voulu créer un univers»

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Roms : "J'ai toujours voulu créer un univers"
(c) Koria

Après trois ans d’absence, Roms a sorti sa première mixtape Prendre. Un projet haut en couleur transpirant l’identité du rappeur parisien.

Après trois année d’absence, l’ovni Roms a fait son retour pour Prendre, à son tour, ses droits sur le rap français. Roms, fier représentant du 75, nous a parlés de ses nouvelles ambitions et de son goût éternel pour la création artistique. Une passion parfaitement narrée dans sa première mixtape Prendre. Entre prises de risque, introspection et description d’un vécu de Parisien, cet enfant du 11ème arrondissement n’a rien laissé au hasard dans ce projet fait au nom de tous ceux qui lui ressemble.

Roms, on se retrouve trois ans après la sortie de ton premier EP Humain et à quelques jours de la sortie de ta première mixtape Prendre. Comment tu te sens ?

Franchement, je vais pas dire que je suis stressé, mais j’espère que ça va bien se passer. J’ai surtout hâte de montrer tout ça au public et d’évoluer avec lui.

En commençant par le titre de cette mixtape, peux-tu nous expliquer ce que tu cherches à «prendre» ?

Je sais pas si je cherche l’estime des gens ou de l’amour. Je cherche une reconnaissance à ce que je fais. J’ai vraiment envie que les gens se prennent l’émotion que je veux faire ressentir.

Comment tu as choisi ce titre ?

C’est une expression qu’on dit souvent avec les potes : «On va prendre». Ça veut dire qu’on va tout ba*ser, et nous on est une génération qui a envie de tout ba*ser. On sait pas trop pourquoi, mais même avant la musique on en avait envie. C’est pour ça qu’on a appelé la mixtape Prendre.

«Je me suis dit que les gens avaient compris cette image un peu spéciale»

On le rappelle, ton premier EP Humain est sorti en 2018, qu’est ce qui a valu une absence aussi longue ?

Il y a eu beaucoup de travail et de remise en question. Même si j’avais eu un succès de ouf avec Humain, j’aurais quand même fait une pause. Ce n’était même pas un pause pour moi, je n’avais même pas commencé. Je devais aller au studio, réfléchir à comment j’allais revenir, rencontrer d’autres producteurs qui puissent financer ma musique. C’est un tout. Mais trois ans, ça va vite en vrai. Pendant trois ans, les gens pensent que t’es dans une grotte, mais moi j’étais beaucoup au studio à réfléchir à notre stratégie, à comment on allait Prendre !

Donc c’était cette pause après Humain était déjà prévue en avance ?

Ce n’était pas prévu, mais ça s’est fait assez naturellement. J’ai toujours su que je voulais revenir dans de bonnes conditions. Je n’avais pas envie de bâcler le travail, et les choses de la vie ont fait que, pour revenir dans de bonnes conditions, il fallait attendre un peu.

Entre temps, tu as signé en major. Qu’est-ce que t’as apporté ce premier EP, quelles leçons tu en a tirées ?

C’était que du positif. Je me suis dit que les gens avaient compris cette image un peu spéciale.

Le 25 septembre 2020, sort le clip de « DADA » en featuring avec Gambi, comment s’est faite la connexion ?

Mon producteur m’a parlé de lui, ce n’était pas encore le phénomène que c’est maintenant. On s’est croisé, on a kiffé, je lui ai dit de descendre à Toulouse parce que j’enregistrais là-bas à cette époque-là, et deux jours après il est venu. C’est le truc le plus naturel.

D’ailleurs, vous vous êtes pas mal mis en scène tous les deux dans le clip, comment vous l’avez pensé ?

C’est Keasy le réalisateur et moi qui avons réfléchis les idées. On voulait un truc simple mine de rien, un moyen de faire un tour de Paris. Le synopsis qu’il m’avait envoyé m’avait bien parlé, l’énergie du truc et comment ça sonnait parisien. Il est pas comme mes autres clips, mais il y a quand même une identité, un truc parisien, une voix que tu peux quand même reconnaître, même si c’est différent.

Sur Prendre on retrouve le titre « Mon frère », un son plutôt introspectif, entre ami perdu, trahison et fameux vécu de parisien. Comment cette ville t’influence dans ta musique et ta vie en général ?

Depuis que je suis né j’habite à Paris même : 11ème, 20ème, 19ème. Je suppose que chaque personne qui habite à Paris est un peu dans une petite bulle, une petite matrice. Sauf que nous c’est un peu poussé, parce que moi je ,e connais que ça. Je connais que Paris, je n’ai pas beaucoup voyagé. Je connais que la manière dont les gens s’habillent ici, comment ils réfléchissent ici. Je trouve qu’à Paris les gens réfléchissent d’une manière bien précise. Très tôt on était matrixé. Avant d’être majeurs, on était des petits fous à Paris, on a fait les 400 coups. C’est ça qui nous caractérise quand on va autre part dans le monde. C’est Paris.

Donc ça coulait de source de représenter la capitale dans ton projet.

Franchement oui. Il n’y a pas énormément de rappeurs qui viennent de Paname même, dans les banlieues c’est pas pareil, c’est une autre mentale. À Paris, les gens veulent faire plus d’argent, le capitalisme est encore pire qu’autre part. Il y a la confrontation entre les très riches et les très pauvres qui est beaucoup plus forte. Il y a un coté à Paris où, j’ai l’impression qu’on vit des trucs de fou.

«Ça va être en sixième que je vais écrire mes premiers textes. Mon premier studio, j’y vais à treize ans»

On retrouve aussi TK en featuring sur « Ouai ouai ouai ». Une collaboration inattendue, tu pourrais nous expliquer comment ça s’est fait et pourquoi ce choix ?

Je trouvais qu’il y avait un contre-pied très intéressant en ramenant TK sur le projet, étant donné qu’on ne fait pas la même musique. Mais je kiffe de ouf ce que fait TK, j’aime bien Marseille, mes producteurs sont du Sud. On ne s’est pas rencontré mais j’ai quand même senti que le gars avait une good vibe. Ça s’est moins fait naturellement que Gambi parce qu’on s’est pas vu, mais c’était quand même du beau travail, on est revenu plusieurs fois sur le son et on a pas mal échangé par message.

Même si les scènes parisiennes et marseillaises sont très différentes, qu’est-ce qui te plait dans le rap marseillais ?

J’aime quand il y a des gens à Paname comme Gambi, qui font des trucs un peu club, on peut croire que c’est en mode JUL, mais c’est en mode french touch. Je suis allé que 2-3 fois à Marseille dans ma vie, il y a des trucs similaires à Paris, mais aussi des trucs très différents. À Paris, comme je t’ai dit, on est dans une matrice bizarre, qui n’est pas forcément exemplaire, mais je me dois de la raconter.

On sait que tu as fait des open mic, c’est d’ailleurs là que tu as rencontré Aladin 135, ce qui t’as permis de freestyler pendant un de ses Planet Rap en 2017, un an avant la sortie de ton premier single. Quand as-tu réellement commencé le rap ?

Déjà je faisais du hip-hop, je regardais des clips, j’ai commencé à découvrir le rap quand j’étais au CP, j’étais vraiment petit. Même quand je ne rappais pas, j’étais déjà très hip-hop, j’avais des durags, des baggys, des Air Force blanches à 6 ans. J’ai toujours été dans le truc grâce à mon grand frère, mais ça va être en sixième que je vais écrire mes premiers textes. Mon premier studio, j’y vais à treize ans.

Du coup qui sont les gens qui t’ont donné envie de rapper, quelles sont tes influences ?

J’écoutais beaucoup de rap à l’ancienne, X-Men, Time Bomb, tous les trucs old-school que mon frère écoutait. Même avant la musique, j’ai toujours voulu créer mon univers. Quand j’étais petit je faisais des spectacles, je ramenais des gens pour mon anniversaire et ça se transformait en spectacle. C’est plein de trucs comme ça qui m’ont inspiré, des films, des acteurs, des gens qui eux aussi ont envie de créer un univers.

Aujourd’hui, tu arrives à montrer des flows plus kickés, mais aussi des sonorités plus mélodieuses, comment tu as réussi à faire la part des choses, entre tes influences très rap et ce nouveau parti-pris ?

Je me mets dans aucun costume, on va au studio depuis très longtemps et on fait ça instinctivement. Quand je vais au studio, je me mets aucune règle, si il y a un truc qui va m’inspirer j’y vais. C’est plus le studio qui vient me chercher que le contraire. C’est selon l’instru, selon ce qu’on voit, la couleur du son.

D’ailleurs tu enregistres au studio Grandeville, et tu as l’air proche de Edge sur les réseaux on peut s’attendre à un feat entre vous ?

Pourquoi pas. Après, même si on n’a pas le même style de musique, c’est vraiment dans la vie qu’on s’est bien entendu. Edge, c’est vraiment un grand-frère, c’est un bon gars de ouf. Je l’ai connu à Grandeville, quand il ne faisait pas encore de son. Tout le monde peut te dire qu’il est super gentil, c’est un ami pour moi.

«Le cinéma et le rap ça reste deux mondes très différents, dans le milieu comme dans le business»

En revenant un peu sur tes proches, tu es issu d’une famille de passionné de cinéma, entre ton père réalisateur et ton frère qui réalise beaucoup de tes clips. Qu’est-ce que ça a pu t’apporter de baigner dans cette culture ?

Ça m’a apporté beaucoup. Comme je t’ai dit, les gens qui m’inspirent sont ceux qui ont envie de créer des univers, et depuis petit, je vois que toutes nos vies sont animées par quelque chose, qui n’est ni l’argent, ni l’amour ou la haine, mais plus par le fait de créer. Chez nous, t’es obligé de créer !

Tu aurais pu choisir la faciliter et choisir de travailler dans le cinéma alors ?

Mon père c’est pas une moula, il va pas claquer des doigts et je vais arriver dans le cinéma. C’est selon le talent de chacun. Il n’est pas producteur, c’est un artiste, un écrivain, il fait ses trucs et moi je fait mes trucs.

Tu te mets souvent en scène dans tes clips, entre « DADA » où au début du clip tu sors d’un violent accident de voiture ou « CRS » qui nous montre une arrestation musclée. Tu es d’ailleurs apparu dans deux films de ton père, est-ce que tu envisages un nouveau passage dans le cinéma ?

Si c’est comme la majorité des rappeurs font dans le cinéma, ça ne m’intéresse pas. Ça dépend du projet, mais le cinéma et le rap ça reste deux mondes très différents, dans le milieu comme dans le business.

Ton projet se clôt sur le titre « Movie », ce choix est lié à ton rapport au cinéma où c’est juste le hasard ?

C’est un son avec une rythmique un peu club, mais il est très personnel ce morceau. Il résume bien ce que je disais toute à l’heure sur Paris, je crois qu’on a un peu trop vu de films. Quand je dis « on », je parle de tous mes amis, mon entourage. Je crois qu’on a vu la vie comme un film. J’ai même hésiter à appeler le projet Movie. Voir la vie comme un film c’est ce que le raconte dans ce projet.

Quel film représenterait le mieux ta vie alors ?

Je vais te dire mon film préféré, parce que ma vie est complexe et il n’y a pas vraiment de film qui la représenterait. Mais du coup, Il était une fois en Amérique, avec ce jeune qui se bat pour réussir, je me reconnais bien dans Noodles. Il est long, et j’espère que ma carrière le sera aussi !

Comme on l’a dit, c’est ton frère qui réalise certains de tes clips, dans tes clips tu es toujours entouré de tes amis, ce qui a valu le son « Ami pour la vie », c’était important pour toi de rendre hommage à ton entourage ?

Honnêtement, je ne fais pas ça pour leur rendre hommage. Mes potes sont avec moi pour que je réussisse, ils connaissent tout l’envers du décor, j’ai pas besoin de leur faire de message. C’était juste l’instru qui m’inspirait ça, la vie, les trahisons, les liens d’amitiés très forts, les amis devenus fous, les amis en prisons, ceux qui sont morts. Après on ne prévoit pas vraiment, on voit sur le moment.

«Je vais essayer de choquer les gens, c’est tout ce que je veux»

Tu fais vraiment ta musique de manière instinctive alors.

Bien sûr. Je fais beaucoup de son, c’est après qu’on trie et qu’on pense à une stratégie. Mais sinon, tous les sons me font penser à quelque chose, j’ai tout le temps envie d’aller au studio. Ça reste une mixtape, même si beaucoup de sons se ressemblent. J’ai décidé d’appeler ça une mixtape pour qu’on comprenne que c’est un univers, il n’y a pas forcément de thème comme un album que je veux faire plus tard, qui sera plus personnel, j’ai déjà des idées dessus. Là c’est un enchaînement de sons, même si tu retrouves une identité dans la voix et dans la manière de dire les choses. Après, comme je t’ai dit, je suis obligé d’aller au studio dans ma tête. Même s’il n’y avait pas de projet ou si j’avais plus le droit de sortir des sons, j’irais quand même au studio.

Ça te procure quoi de t’imposer ce rythme ?

Il y a des gens, des artistes qui ont tout le temps besoin de créer. Moi, mon kiff, c’est de monter tout cet univers et de mettre des mots dessus.

Ça veut dire que tu te verrais rapper toute ta vie ?

Non, mais je ferais toujours des projets artistiques. Je vais essayer d’apporter aux gens pendant longtemps, essayer de prendre pendant longtemps, même si ce n’est plus du rap.

À présent, comment tu envisages la suite, après la sortie de la mixtape Prendre ?

J’ai un peu arrêté le studio, en ce moment je suis en promo. J’ai fait une petite pause, mais elle sera bénéfique je pense. Quand j’y retournerais on verra si ce sera pour une deuxième mixtape ou un album, mais je préfère rester mystérieux sur ça. Mais en tout cas, on est déjà en train de travailler sur des trucs forts.

Et nous qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour la suite ?

Vous pouvez me souhaiter que je vous choque, je vais essayer de choquer les gens, c’est tout ce que je veux.

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