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Comment Vald a fait de "Ce monde est cruel" un album conscient Comment Vald a fait de "Ce monde est cruel" un album conscient

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Le jour où Vald a arrêté de rire

© Pierre Brault

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Déterminé à effacer son image de trublion, Vald a imposé une rupture, aux médias et aux fans, pour faire de Ce monde est cruel un album conscient, qu’ils le veuillent ou non.

«Gommer au maximum mon image “bête de foire”», annonçait d’emblée Vald, lors de son interview pour Society. Dévoilé le 3 octobre 2019, cet entretien papier a été la première approche de l’artiste avec les fans, avant que sa promotion ne s’intensifie jusqu’à la sortie de Ce monde est cruel, le 11 octobre. En retraçant cet itinéraire, on remarque que Vald a soigné sa promotion pour couper avec l’image de complotiste-rigolo qu’il traînait. Jusqu’à parfois exagérer la réalité et jouer avec son nouveau personnage.

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Vald n’est plus un rigolo

Partons du point numéro 1 et l’approche médiatique de l’album. Auprès de Society, la quasi-intégralité de l’entretien se développe autour de l’obscurité de l’album, de son ambiance noire, qui dénote de son personnage de trublion costumé de « Désaccordé ». Après plusieurs questions à cet égard, Vald finit par demander au journaliste: «Tu as trouvé le disque un peu triste, toi ?». «Un peu, oui…», lui répond-il. L’artiste explique que ce nouvel opus est un concentré de sa déprime et qu’il s’agit d’un «album-exposé» qui souhaite illustrer pourquoi ce monde est cruel.

Ces propos sont appuyés par sa longue interview avec Konbini, à laquelle participent également quelques membres de son entourage. Là encore se développe le champ lexical de la déprime et sa volonté de marquer une rupture avec son ancien personnage. L’idée est claire : Vald est devenu consciencieux, «à moi de leur envoyer la quantité nécessaire de morceaux sérieux pour leur montrer que je ne suis pas un rigolo», poursuit-il pour Society. Ça s’entend.

Ces interviews sont intéressantes, puisque dévoilées avant la sortie de l’album. Jusque-là, le public ne peut se fier qu’à ce que Vald veut montrer de son disque. Et si lui le présente comme noir et sérieux, l’imaginaire des fans le suit. D’autant que, parallèlement, l’artiste a élaboré toute une promotion artistique sombre pour faire écho à ce nouvel univers. 

Un public matrixé

C’est ainsi que, en musique, Vald a voulu assumer son shift. À commencer par « Journal perso 2 », évidemment. Un morceau brut et sincère, agrémenté d’un clip sombre et torturé. Un faux-single qui mène le public vers une sombre piste de l’album. On aurait presque de quoi oser renouveler l’analogie avec un certain Eminem et le clip de « The Way I Am » et pourquoi pas un épilogue à la The Marshall Mathers LP, où le rappeur américain souligne l’image que les médias ont construit de lui et ses répercussions. Lassé de ce personnage clownesque, la théorie est tangible.

Autres éléments disponibles en amont : la sombre cover de l’album, où Vald, masqué derrière un filtre rouge flamme, détourne l’affiche d’Apocalypse now. Une notion apocalyptique qui découle jusqu’au nom de l’album, Ce monde est cruel, où l’idée d’un constat glacial sur le monde se détache. C’est matrixé par cette ambiance que le public a pu découvrir les seize tracks de l’album, le 11 octobre.

En fait, cet univers sombre se vérifie sur le fond, moins sur la forme. À la surface, Ce monde est cruel n’est pas moins sombre que ne l’était XEU. En tout cas, pas de là à construire sa promotion autour. XEU est tout aussi dépressif (« Résidus », « Réflexions basses » ou « Gris »), Ce monde est cruel tout aussi fantaisiste (« Ce monde est cruel », « Ma star » et »Rappel »). Toutefois, la subtilité passe par le fond des morceaux, beaucoup plus censés. 

Rap conscient 2.0 

Ce monde est cruel n’est pas toujours «triste», mais il est terriblement lucide. Chaque morceau supporte une thématique dénonciatrice qui, selon Vald, rend le monde cruel. Son monde à lui : de la pension qu’il doit verser à son ancienne campagne à l’oppression des groupies en passant par sa solitude. L’artiste fait preuve d’un ton beaucoup plus explicit, là où il se contentait d’éparpiller métaphores et punchlines acides dans XEU

Parlons donc rap conscient. Pas de boom-bap ni de charleyston, mais de vraies revendications, à l’image de l’inégale répartition des richesses et quelques tacles bien sentis envers la classe politique. Là où Vald est vraiment devenu sérieux, c’est en abandonnant cette facette complotiste bancale pour exposer de vraies réalités. L’album est plus accessible, plus compréhensible. Il conserve toutefois cette manière originale de personnifier ses thématiques, notamment avec « Pensionman » ou « Ignorant », caricature amère de l’égo-trip.

Ainsi, Vald n’a pris que le meilleur du rap conscient, par peur évidente de tomber dans le stéréotype. Une crainte qu’il frôle, d’ailleurs, avec « Journal perso 2 », où le piano-voix s’inspire des codes évidents du genre. « Je voudrais dire des trucs sérieux, mais je ne veux pas faire chier les gens, explique-t-il pour Le Monde. Le monde est déjà tellement sérieux, je ne vais pas encore en rajouter en faisant de la musique sérieuse. »

De toute façon, cette «musique sérieuse» ne lui conviendrait pas, lui qui, caché derrière ses fidèles lunettes de soleil et son sourire narquois, se laisse guider par ses pulsions artistiques les plus folles. Lesquelles l’ont mené à tourner un clip pornographique, mettre en scène la mort d’un ministre et l’assassinat de ses fans. 

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